On n’a jamais autant parlé de la violence dans notre société moderne. On aurait pu croire qu’avec la sensibilisation de l’opinion et une plus grande égalité entre les hommes et les femmes, les débordements diminueraient. Il n’en est rien. Les violences intrafamiliales témoignent du fait que la violence n’a pas disparu. Elle se décline seulement de manière plus subtile.
Selon l’ONU femmes, « les violences conjugales et intrafamiliales représentent tous les actes de violence physique, sexuelle, psychologique, économique et/ ou administrative qui surviennent au sein de la famille ou du foyer1 ». Elles sont souvent confondues avec la colère – une émotion normale –, l’agressivité, l’affirmation de soi – une manifestation de ses points de vue –, ou encore le conflit – né d’une divergence d’opinions ou de valeurs.
Le cycle de la violence
L’auteur des actes de violence, le plus souvent un homme, met en place un mode de relation fondé sur le contrôle et la domination. Il organise soigneusement ce système en usant de la force et de la contrainte et, surtout, d’une organisation efficace pour imposer sa volonté à l’autre. Le cycle de la violence est maintenant bien connu.
Tout commence par l’installation d’un climat de tension, fait de reproches injustifiés. L’homme a des accès de colère, menace sa compagne du regard, ne lui parle plus durant des heures… Inquiète, la femme veille sur sa conduite pour ne pas le contrarier : elle s’ajuste à ses humeurs. Paralysée par la peur, elle supporte et ne réagit pas.
L’emprise se poursuit par des agressions, verbales, psychologiques, physiques, sexuelles ou spirituelles. La femme se sent humiliée, abattue. Dans la troisième phase, l’agresseur transfère sur elle la responsabilité de ses déchaînements. Il se justifie, invoque le stress, le travail, ou encore l’alcool et affirme qu’elle n’a pas à « le provoquer ». La femme culpabilise.
La rémission amoureuse, ou « lune de miel », est la dernière phase de ce cycle. C’est la plus nocive pour la victime parce que l’agresseur semble regretter ses actes inacceptables. Il promet de ne plus recommencer, envisage un accompagnement, etc. uniquement pour désamorcer les plaintes. Mais la femme le croit sincère : elle reprend espoir et, parfois même, nie les maltraitances. Si elle a déposé une plainte, elle la retire.
Cette ultime phase permet à la victime de supporter toutes les autres. Elle espère, en vain, un changement pérenne. Mais bientôt, c’est le retour à la phase 1, la tension reprend. C’est un cycle sans fin.
Pourquoi les victimes restent-elles ?
Ces femmes « restent » parce que leur conjoint les terrorise. Elles n’ont, le plus souvent, pas les moyens matériels et psychologiques de fuir et sont complètement isolées. Elles espèrent que l’autre changera, ce que l’Église les encourage trop souvent à croire.
Il est important de se souvenir que ces comportements résultent d’une volonté de l’agresseur de faire du mal.
Pour l’enfant qui entend ou voit les brutalités que subit l’un de ses parents, les conséquences sont graves à court, moyen et long terme. En effet, l’enfant n’est pas seulement témoin de la maltraitance que subit un de ses parents, mais il est une co-victime, car il est « sacrifié ». À l’âge adulte, il existe un risque aggravé qu’il reproduise ces mauvais traitements ou se victimise.
Pour toutes ces raisons, il est impératif d’informer, d’expliquer, d’accompagner les femmes prises dans le piège de la violence intrafamiliale.
Par Cosette Fébrissy, psychologue clinicienne