Le nombre de réfugiés dans le monde a atteint des niveaux records, passant de quinze millions en 2010 à trente-cinq millions en 2022. Alors que 76 % d’entre eux sont accueillis dans des pays à faible ou moyen revenu, les voies légales et sûres comme les Couloirs humanitaires sont des outils cruciaux pour leur protection. Guilhem Mante, délégué au pôle Accueil de l’étranger de la FEP, analyse les défis qu’ils représentent.

Les voies légales et sûres offrent une alternative à la migration irrégulière en permettant aux personnes réfugiées d’accéder à des pays comme la France par des moyens légaux, dans un cadre sécurisé. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) estime que 2,4 millions de réfugiés ont besoin d’une réinstallation en 2024.

Des bénéfices et des défis

Les Couloirs humanitaires ont montré plusieurs bénéfices tangibles dans trois domaines : l’inclusion sociale, puisque 86 % des réfugiés accueillis se sentent intégrés dans la société française grâce à l’implication de collectifs citoyens qui facilitent leur immersion ; le changement de perceptions, l’accueil digne des réfugiés permet de modifier la perception des personnes réfugiées par les populations locales ; le renforcement des dynamiques locales alors que l’accueil de réfugiés redynamise certaines régions en favorisant l’engagement citoyen et le lien social. Toutefois, malgré ces succès, l’avenir des Couloirs humanitaires se heurte toujours à de nombreux défis :

  • un financement non pérenne : les dispositifs de voies légales comme les Couloirs humanitaires sont financés de manière souvent ponctuelle et parcellaire, ce qui rend leur durabilité incertaine ;
  • l’absence de cadre juridique clair : les voies légales manquent de reconnaissance formelle dans la législation, ce qui limite leur développement ;
  • l’absence de politique publique : aucune politique publique ne prévoit le développement des Couloirs humanitaires.

Un nécessaire plaidoyer pour la durabilité des voies légales

La FEP a élaboré une stratégie de plaidoyer pour relever ces défis et développer des voies légales et sûres. Elle s’appuie sur de grands principes. D’une part, les Couloirs humanitaires doivent compléter les programmes de réinstallation sans se substituer à l’engagement de l’État. En d’autres termes, il faut offrir davantage de mécanismes d’accueil légaux et sécurisés et non pas se substituer à ceux existants. D’autre part, il faut préserver le droit d’asile : le développement des voies légales ne doit pas restreindre la possibilité de demander l’asile sur le sol européen. Il doit rester accessible à toutes les personnes en besoin de protection. Enfin, l’engagement citoyen responsable est un levier pour inciter les États à renforcer leur rôle dans l’accueil des réfugiés, et non un substitut aux responsabilités publiques.

En s’adossant à ces principes, la FEP poursuit des objectifs de plaidoyer pour une intégration des Couloirs humanitaires dans une politique publique durable : l’obtention d’un cadre juridique sécurisant l’existence des Couloirs humanitaires et/ou des voies légales ; l’émergence de mécanismes de financement public dédié permettant leur mise en œuvre et leur développement ; leur intégration dans une politique publique de développement des voies légales et sûres.

La FEP, en tant qu’acteur clé des voies légales, souhaite convaincre les autorités françaises et européennes de cette nécessaire intégration des Couloirs humanitaires dans une politique publique, nationale et européenne, dotée de financements structurels et d’un cadre juridique solide.