À partir d’une question d’actualité, la « boussole de la FEP » propose des pistes de réflexion pour nourrir le sens de nos actions et tenter d’éclairer le sens des événements que nous traversons.

La parole

Jésus a été arrêté, jugé, condamné, crucifié. Il est mort. Le temps s’étire, et rien ne semble avoir changé. Ses disciples retournent à leur métier d’origine : la pêche. Mais cette nuit-là, ils ne prennent rien. C’était déjà le matin ; Jésus se tint là sur le rivage, mais les disciples ne savaient pas que c’était lui. Il leur dit : « Eh, les enfants, n’avez-vous pas un peu de poisson ? » – « Non », lui répondirent-ils. Il leur dit : « Jetez le filet du côté droit de la barque et vous trouverez. »
Ils le jetèrent et il y eut tant de poissons qu’ils ne pouvaient plus le ramener.

La Bible, évangile de Jean chapitre 21, versets 4 à 6

Chemin de réflexion

Accepter d’être rejoint

Les disciples sont dans la nuit. Manque de perspectives. Sentiment d’un retour à la case départ pour annulation de projet. Fatigue des nuits d’attente, angoisse d’être à leur tour inquiétés. Travail vain. Mains vides, vides de sens, de ce qui pourrait nourrir physiquement, spirituellement. Pas un poisson ! Toute ressemblance avec nos vécus existentiels n’est pas fortuite… Nous sommes invités à vivre la même expérience spirituelle, à découvrir un Dieu qui se rend présent, qui se montre avec évidence, se fait connaître dans une rencontre interpersonnelle, là, au creux de nos épuisements. J’aime relire combien c’est avec affection (« les enfants ») que Dieu vient alors à ma rencontre en m’invitant à mettre des mots sur ma fatigue.
J’aime cette invitation à voir un messager de Dieu dans celui qui me propose de recommencer le geste déjà cent fois répété. L’appel à la confiance me fait reconsidérer la situation bloquée. Je peux jeter un regard nouveau sur mon quotidien et ma fatigue. L’épisode biblique se termine par un petit déjeuner poisson-pain sur la plage avec Jésus ressuscité, comme pour nous assurer que nous serons nourris dans cette expérience spirituelle.

Isabelle Bousquet, pasteure, Fondation John BOST

 

Pour la vie

À l’aube de l’année 2022, que vais-je souhaiter à mes proches, mes amis, mes collègues ? Ce qui compte, me semble-t-il, plus encore que le contenu du message, c’est l’écriture que l’on reconnaît sur l’enveloppe, ou le regard sincère qui accompagne un « meilleurs vœux » tout simple. C’est cela qui fait de nous des êtres en relation, riches de toutes les attentions que nous échangeons et du temps partagé. La lettre de Jean évoque la « bonne santé de l’âme ». Autrement dit, le fait que notre être intérieur se porte bien, que la vie rayonne dans toute notre personne.
Dans les difficultés que nous traversons, nous savons que quelque chose est plus fondamental que le bien-être ou les succès : trouver un sens à ce que l’on fait, goûter des joies simples et profondes, se sentir reconnus, co« Il nous saoule ! » comme dirait l’autre. Encore tenir, continuer, recommencer même à la sixième vague !
Alors que cela n’a rien donné jusque-là et que l’on a trimé jusqu’à l’épuisement. On n’en peut plus, on fait grève ! Déjà les autres nous ont quittés, il ne reste que nous, moulus, ratatinés, dégoutés, moins nombreux pour faire le même boulot. C’est exactement ce que pensent les disciples quand Jésus leur enjoint de retourner pêcher, faire leur travail, ce qu’ils savent faire, dans la nuit de l’incertitude ! Ils le font et, cette fois, grâce à Dieu, cela marche ! Une persévérance qui a payé alors qu’ils n’y croyaient plus, n’en pouvaient plus.
Et si, au cœur du découragement, du sentiment d’impuissance, il fallait remettre ça, recommencer ? Non pas au nom d’un impératif moral, mais dans une obéissance à celui qui est vie et veut nous sortir du désespoir. Il nous promet qu’il y a une issue au bout de chaque tunnel, une vie plus forte que la mort, la joie après la peine. En mettre encore un coup… pour la vie !

Pascal Hubscher, pasteur, responsable aumônerie sanitaire et médico-sociale de l’UEPAL

 

Recevoir de l’autre

Ce matin-là, le téléphone avait retenti à 7h. Deux soignants manquaient à l’appel. Comment faire ? Où les professionnels en poste puiseraient-ils de nouvelles ressources pour garantir, une fois encore, une qualité de service aux résidents ? C’est alors que des réponses évidentes s’imposèrent : sens de l’engagement, amour du métier, empathie. « Oui, je vais donner à l’autre ce que j’aimerais recevoir en pareilles circonstances… »
Dans la crise que nous traversons, les plus belles formes de solidarité s’expriment au cœur de l’épreuve, comme si notre fragilité venait rejoindre celle de ceux que nous accompagnons, comme si mieux éprouver l’altérité nous permettait de recevoir des signes de reconnaissance et d’espérance. Dès lors que la fatigue et le découragement s’installent, n’est-ce pas l’autre qui m’accueille de façon inconditionnelle comme pour me rappeler implicitement cette parole d’Ésaïe (43.4) : « Tu as de la valeur à mes yeux et je t’aime. » ?

Clément Grenier, directeur de la Maison Protestante de Retraite de Bordeaux

 

Des mots pour prier

Dieu notre Père, tu viens vers nous dans la nouveauté, et nous allons si souvent vers toi avec nos habitudes.
Tu viens vers nous dans la vérité, et nous allons si souvent vers toi avec nos illusions.
Tu viens vers nous pour nous mettre à part, et nous allons si souvent vers toi en espérant rester comme les autres.
Donne-nous la joie de découvrir ton chemin, en Jésus-Christ, le Seigneur ressuscité ; il nous conduit vers toi, pour y vivre, dans la joie de l’Esprit, l’amour qui défie les siècles des siècles.
Amen.
D’après Pierre Griolet, « Tu viens nous rassembler », Mame édition, 1976, p.9