Comment le pouvoir peut-il user de violence pour contribuer à retisser le lien social ? On doit le concept de « violence légitime » au sociologue Max Weber. Il l’évoque dans une conférence, en 1919, dans laquelle il distingue l’État des autres types de communautés humaines.

L’État revendique une violence légitime

L’État, affirme Weber, est une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé, revendique avec succès, pour son propre compte, le monopole de l’usage légitime de la force physique1 . Max Weber définit ce qui est, et non ce qui doit être. Sa définition des pouvoirs de l’État n’est pas une justification de la violence envers le peuple.

Le terme de « légitime » est aujourd’hui utilisé comme une justification, une nécessité, et non comme une possibilité, un constat, ainsi que l’entendait Max Weber. Les citoyens reconnaissent que c’est le pouvoir politique ou judiciaire qui, en dernière instance, doit trancher les conflits. Pourtant, aucun texte du droit français ne permet de définir, en toute rigueur, les limites du périmètre que recouvre cette violence légitime. Elle doit être exercée de manière proportionnée pour empêcher un acte délictueux ou criminel, ou capturer celui qui l’a perpétré.

La contrainte plutôt que la violence

Comme le souligne Jean-Jacques Rousseau dans Le Contrat social, le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître ; la force doit alors être transformée en droit et l’obéissance acceptée comme un devoir. L’exercice de la violence légitime par l’État, à l’encontre d’individus qui menacent la paix et la sécurité des citoyens, ne doit jamais faire oublier que, pour être légitimes, la justice et la force doivent s’associer. 

Ainsi, ce qui est juste sera fort et ce qui est fort sera juste. Le problème réside dans le terme de « violence » qui laisse à penser, même au plus haut niveau, qu’elle peut être exercée indifféremment par l’État ou des individualités malintentionnées. Max Weber l’avait d’ailleurs compris puisque, dans des écrits ultérieurs, il utilisa le terme de contrainte plutôt que de violence. 

Par Brice Deymié, pasteur de l’Église protestante française au Liban