Hystérie collective ! Voilà l’expression qui revient souvent dans les réseaux sociaux concernant les dernières « affaires » autour de la laïcité : une affiche en soutien aux chrétiens persécutés, une jupe trop longue dans un collège, et quant aux barbes, elles sont de retour chez les trentenaires, mais il y a des barbus plus barbus que d’autres ! Comment penser la laïcité dans notre société sécularisée ?
La loi 1905 ne vient pas tolérer les religions, mais garantir la liberté religieuse : « Art. 1 La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. » « Art. 2 La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Et l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’Homme donne un cadre supplémentaire à la loi française : « La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. » Enfin, la loi 1905 précise que la neutralité stricte doit être appliquée par ses agents dans les lieux publics, gérés par les institutions de la République (école, mairie, préfecture…), mais pas par ses usagers (sauf en milieu scolaire). À ne pas confondre avec les espaces publics comme la rue, la plage…, et les espaces privés (entreprise, associations, famille, cercle intime…) où la liberté d’expression est garantie, même si elle n’est jamais absolue car elle doit se vivre dans le respect de celle d’autrui, de l’ordre public, et pour les salariés, sans empêcher la bonne marche de l’entreprise ou la réalisation des missions confiées.
Un pas plus loin
Et si nous allions encore plus loin dans la non‑reconnaissance des religions pour gagner en liberté ? En préservant la loi de 1905 qui garantit la liberté de culte, l’État ne pourrait-il pas considérer les associations cultuelles au même titre que les associations 1901 ? Ni plus ni moins. D’ailleurs, beaucoup d’Églises évangéliques et autres religions vivent en association loi 1901. Considérer toutes les associations, qu’elles soient cultuelles ou non, comme des partenaires de la vie de la cité du moment qu’elles respectent les lois de la République (comptable, immobilière, salariale…). Comme d’autres associations, les religions n’auraient pas plus et pas moins de droits ou de places particulières. Des subventions seraient toujours interdites pour l’exercice du culte, mais continueraient à être attribuées aux structures éducatives, sociales, caritatives même confessionnelles, qui participent largement à la citoyenneté et la solidarité, sur des projets respectant les valeurs de la République (démocratie, refus du racisme…). Il faudrait alors abroger des lois visant implicitement les pratiques religieuses. Car notre législation dispose de tous les outils pour lutter contre ce qui pourrait troubler l’ordre public (manifestation sauvage, manipulation, malversation financière, urbanisme, appel à la haine…). Ce serait la fin de pratiques concordataires où certaines religions sont reçues, courtisées et d’autres ignorées. Les religions gagneraient en liberté. Elles pourraient s’exposer librement sur les places et les murs, à côté d’autres affiches qui appellent au culte de la consommation, au don pour des ONG ou aux rencontres (extra) conjugales !
Dans une société plurielle, l’État ne doit-il pas vivre cette neutralité totale en s’occupant principalement des problèmes d’ordre public et du vivre-ensemble, en initiant l’enseignement du fait religieux pour lutter contre l’ignorance, et en favorisant les espaces de rencontres pour des relations pacifiques entre les mini-jupes et robes longues ?