À partir d’une question d’actualité, la « boussole de la FEP » propose des pistes de réflexion pour nourrir le sens de nos actions et tenter d’éclairer le sens des événements que nous traversons.
La parole
Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance vous en a-t-on ?
Car les pécheurs aussi aiment ceux qui les aimentLa Bible, Évangile de Luc, chapitre 6, verset 32
Chemin de réflexion
L’hyper générosité frise-t-elle la naïveté ?
Quand j’entends que la pandémie a encore creusé l’écart entre les riches et les pauvres et que la guerre en Ukraine profite aux marchands d’armes, je suis en colère. Mais j’apprends aussi que les Français sont généreux et donnent, en moyenne, beaucoup aux associations caritatives : cela m’apaise. Et moi, suis-je solidaire ? Un jour, j’ai payé un billet de train à un inconnu qui prétendait vouloir rejoindre sa mère malade, et je me suis aperçu plus tard qu’il m’avait roulé. Trop de générosité frise la naïveté.
Quand je prête de l’argent à quelqu’un, j’attends qu’il me rembourse. C’est normal, c’est humain. Mais voilà, Jésus-Christ me demande d’aller plus loin. Il déclare à ses interlocuteurs : « Prêtez sans rien espérer en retour. » Il va même jusqu’à dire : « Aimez vos ennemis ! » Mais là, ne met-Il pas la barre trop haut ? Certes Il a donné l’exemple, Il a même pardonné à ses bourreaux. Mais je connais mes limites, j’ai bien du mal à suivre tous ses commandements. Si c’est vraiment cela qu’Il attend de moi, qu’Il me vienne en aide !
Christian Tanon, pasteur, Église protestante unie de France, L’Escale, Paris
Un élan du cœur
Il semble plus simple de se soucier des peuples qui subissent une invasion guerrière dans une culture qu’on suppose plus proche et surtout à notre porte. Le peuple ukrainien a reçu des élans de solidarité exemplaires. D’autres endurent, parfois depuis longtemps, l’autoritarisme civil ou religieux et les violences économiques dans l’indifférence de beaucoup. Parfois aussi, la solidarité peut être biaisée par un regard de pitié sur l’autre qu’on ne perçoit plus comme notre égal. Trop souvent, en effet, on peut constater que des personnes s’engagent en moralisant, marquées d’à priori, croyant savoir ce qui est bon pour l’autre, au lieu de l’accueillir tel qu’il est, à l’écoute de son véritable besoin.
En considérant notre prochain comme tel, l’élan de solidarité vient du cœur et ne répond à aucune injonction, il conduit à donner ce que nous aimerions recevoir nous-même. Être vraiment solidaire, c’est s’assurer de la dignité de l’autre dans ce qu’il vit, sans rien attendre pour nous en retour.
Rémi Droin, pasteur, Toulouse Ouverture – To7
Notre engagement n’a pas de date de fin
En tant que membres d’une Église, nous avons souhaité apporter notre soutien à des populations dans le besoin. Nous aidons des familles migrantes dont la demande d’asile a été refusée et qui se retrouvent sans ressources : distribution alimentaire, don de vêtements, cours de français, temps d’accueil, club biblique. Notre leitmotiv est la Parole de Dieu : « Partage ton pain avec celui qui a faim, et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile ; si tu vois un homme nu, couvre-le, et ne te détourne pas de ton semblable. » (Ésaïe 58.7) Ce n’est pas toujours simple de faire corréler sa foi et ses actes.
Même si la plupart des bénéficiaires sont reconnaissants, certains ne sont pas satisfaits des aliments que nous leur proposons, des mamans refusent des dons de poussettes qu’elles ne trouvent pas assez bien… La situation des familles que nous accompagnons évolue peu, nous n’avons pas l’assurance qu’elles puissent un jour s’installer en France et c’est frustrant. Mais notre engagement n’a pas de date de fin et nous poursuivons notre action sereinement, certains que notre projet est entre les mains de Celui qui nous appelle à aimer et aider notre prochain.
Rachel Merkling, responsable de l’entraide de l’Église méthodiste de Strasbourg
Des mots pour prier
En ce jour, Seigneur Jésus-Christ, nous regardons à toi ; nous nous mettons à ton école, à l’école de l’amour qui, en toi, a su aimer jusqu’à l’extrême ; à l’école de l’amour qui ne calcule pas ; qui ne se contente pas de ce qui donne bonne conscience.
Lorsque nous sommes devant notre limite à aimer, devant nos peurs à aimer jusqu’à l’extrême, nous regardons encore à toi, sûrs que tu viendras nous tendre la main, pour nous sortir de nous-mêmes et nous rendre victorieux de ces faiblesses-là.
Entraîne-nous, Seigneur Jésus, entraîne-nous sur le chemin de l’amour, jusqu’à l’extrême.
Sœur Évangéline, ancienne prieure de la Communauté des Diaconesses de Reuilly