La mauvaise image de la communication, due principalement aux abus du monde lucratif et du monde politique, constitue un héritage lourd à porter, quand le plaidoyer est traditionnellement vu de manière plus positive. Il serait cependant artificiel d’opposer les deux : ils doivent se compléter.
Une fatigue informationnelle palpable
Selon une étude de l’ObSoCo (Observatoire Société et Consommation), un Français sur deux est touché par une fatigue informationnelle avec, pour conséquence, la tentation de rester à distance d’une actualité anxiogène. Le plaidoyer associatif participe hélas à cette anxiété et risque de devenir inaudible quand les mauvaises nouvelles se succèdent. Si le plaidoyer permet d’atteindre les adeptes d’une veille sociale continue, sa capacité à toucher celles et ceux qui se protègent de la litanie des dysfonctionnements du monde est beaucoup plus incertaine.
Lorsque le problème n’est pas le manque d’information, mais le trop-plein d’information assorti à un immense sentiment de « déjà-vu », la (bonne) communication propose de faire un pas de côté et de présenter le réel sous un jour nouveau, de susciter une attention inédite.
Tout en restant humbles face à notre réussite, faire ce pas de côté a été la volonté de l’Armée du Salut avec la dernière campagne de communication « Je recrute ». Les acteurs du social et du médico-social marchent en permanence sur une ligne de crête, et doivent alerter sur les difficultés qu’ils rencontrent dans leur établissement sans alimenter le discours ambiant négatif.
Les clés d’une campagne réussie
Comment, dans ce contexte, encourager les bonnes volontés à nous rejoindre, en tant que professionnels, bénévoles ou donateurs ? Notre choix a été de faire lancer cet appel dans un film télévisé par ceux et celles qui ont grandement besoin de notre aide. Chacun déclare à la caméra un pressant « Je recrute », pour exprimer l’urgence de la situation. Ces personnes avaient toutes un profil LinkedIn qui relayait des offres d’emploi réelles de l’Armée du Salut (par exemple d’un travailleur social, d’un·e aide-soignant·e ou d’un·e infirmier·ère, d’un·e psychologue, etc.).
Notre volonté était donc d’avoir un message à la fois clair et précis (« Je recrute »), percutant par les situations proposées (notamment la santé psychique des jeunes) et adapté aux téléspectateurs comme aux professionnels du secteur en recherche d’emploi sur LinkedIn.
Le succès est conditionné à la répétition et de nombreuses autres solutions doivent être déployées, comme l’implication de personnalités proches des causes, pour contribuer à légitimer les messages et élargir leur portée auprès des publics les plus inaccessibles.
Enfin, le dernier enjeu est de réussir à prendre le pouls de la société, de manière à saisir le bon moment pour s’exprimer. La crise du Covid-19, durant laquelle l’importance des soignants a été largement reconnue, s’avérait ainsi opportune pour les valoriser.
Qu’il s’agisse de l’image associée aux plus fragiles ou de celle de nos métiers, la vocation et la beauté de la communication des grandes causes demeurent : lutter contre les stéréotypes et rendre la réalité visible et audible à tous, aussi difficile que ce soit.