Érigé comme figure de la solidarité et de la charité envers les plus démunis en France, l’Abbé Pierre a fait en sorte de cacher ses méfaits aux yeux du monde pendant de longues années. Après les révélations des quatre rapports successifs, faits à la demande d’Emmaüs, sur les nombreuses violences sexuelles sur des femmes et des enfants commises par l’abbé, d’autres informations ont montré que le prêtre, entré dans l’ordre des capucins, usait parfois de l’argent d’Emmaüs comme du sien.
En effet, selon les témoignages d’une source anonyme, citée dans une enquête du Monde sortie le 19 décembre : « L’abbé Pierre mélangeait tout, il confondait Emmaüs avec sa propre famille et confondait l’argent d’Emmaüs avec le sien. » Comme l’indique le quotidien du soir, le prêtre avait annexé une lettre dans l’un de ses testaments provisoires où il indique avoir fait déposer les noms « Abbé Pierre », « Emmaüs », et « Emmaüs France, fondateur Abbé Pierre » à l’Institut national de la propriété industrielle. Le tout afin « d’en éviter tout usage abusif ».
Emmaüs et le flou légal organisé
Une initiative qui montre bien l’entremêlement de son nom avec l’avenir des différentes associations qu’il a créées. Le prêtre avait pourtant été évincé des instances dirigeantes après son internement de six mois en psychiatrie à cause de son comportement déjà extrêmement problématique avec de nombreuses femmes. Comme le révèle le dossier « Abbé Pierre » conservé au Centre national des archives de l’Église de France à Issy-les-Moulineaux, les frontières légales des différentes œuvres de l’Abbé Henry Grouès, de son vrai nom, étaient loin d’être claires.
Selon le contenu d’une note du Secours Catholique mandaté par l’archevêché de Paris, l’association Emmaüs n’avait aucune existence légale au lendemain de son appel sur Radio Luxembourg. En effet, aucun CCP (compte courant postal) n’a été ouvert au nom de la structure depuis l’ouverture de la campagne de dons. De plus, les subventions collectées furent perçues sur trois comptes bancaires que les seuls signataires accrédités, l’abbé Pierre et sa secrétaire, Lucie Coutaz, utilisaient à la fois pour les différentes œuvres du prêtre et leurs dépenses personnelles. Comme le révèle Le Canard Enchaîné, l’abbé piochait également dans les comptes de l’association pour entretenir des femmes précaires dont il exigeait en échange des faveurs sexuelles, ainsi que leur silence.

