Le Vatican savait, au moins depuis 2007. Rome était au courant de la conduite de l’abbé Pierre, accusé depuis mi-juillet d’agressions sexuelles par plusieurs femmes, dont des mineures, rapporte Le Monde. “Je ne sais pas quand le Vatican l’a appris. Je ne sais pas. Je ne sais pas parce que je n’étais pas ici [il a été élu en 2013], et ça ne m’est pas venu à l’esprit d’effectuer une recherche sur cela. Mais, certainement, après la mort [de l’abbé Pierre, en 2007], c’est sûr. Mais avant, je ne sais pas”, a expliqué le pape lors d’une conférence de presse organisée dans l’avion qui le ramenait de Singapour après un voyage en Asie.
“L’abus sexuel des enfants et des mineurs est un crime ! C’est une honte !”, a condamné le chef de l’Église catholique. La plus jeune victime connue de l’abbé Pierre avait 8 ans au moment des faits. Le souverain pontife ne s’était jusque-là pas exprimé sur ce sujet. “Les péchés publics sont publics. Et ils doivent être condamnés. Par exemple, l’abbé Pierre : c’est un homme qui a fait tant de bien, mais c’est aussi un terrible pécheur”, a ajouté le pape François.
Un “travail de vérité”
Le 6 septembre dernier, de nouveaux témoignages de femmes accusant l’abbé Pierre d’agressions sexuelles ont été recueillis par la commission indépendante chargée “d’expliquer les dysfonctionnements” qui lui ont permis “d’agir comme il l’a fait pendant plus de cinquante ans”.
Dans un communiqué, la Conférence des évêques de France “salue” les propos du pape François. Selon elle, les propos du souverain pontife sur l’abbé Pierre “encouragent” un “travail de vérité et de clarification historique”. Et d’ajouter que ces propos vont dans le “sens du travail douloureux et long qu’a engagé l’Église en France depuis la Ciase (la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église) et le chemin sur lequel les évêques d’aujourd’hui continuent à être déterminés à avancer”.
“Une cure psychiatrique” et un “adjoint”
Invitée sur RTL dimanche 15 septembre, Valérie Fayet, l’ex-présidente du Secours catholique en France, a estimé que la vigilance autour de l’abbé Pierre “n’a pas été suffisante ni suffisamment sévère”. Selon l’ancienne dirigeante, “l’Église a fauté”. “À l’époque, dans les années 1950-1960, il y a eu une forme de vigilance, mais qui n’a pas été suffisante ni suffisamment sévère, juge-t-elle. On ne peut pas juger les années 1950 avec le regard d’aujourd’hui, mais c’est extrêmement douloureux de se dire qu’il y a eu en plus une forme de complicité d’une partie de l’institution.”
Car comme l’a reconnu le président de la Conférence des évêques de France, Éric de Moulins-Beaufort, lundi 16 septembre dans une tribune publiée dans Le Monde, des “mesures ont été prises à l’époque, dont une cure psychiatrique”. “Quelques évêques au moins” étaient au courant “dès 1955-1957” du “comportement grave de l’abbé Pierre à l’égard des femmes”. Un adjoint avait également été désigné, mais l’abbé Pierre s’est visiblement “ingénié à tromper” sa “surveillance”.