Un scrutin majeur de la vie politique des Français qui auront  à se prononcer en faveur de l’un des projets de société proposés pendant la campagne par les différents candidats. À cette occasion, le comité de rédaction de Proteste a souhaité exprimer le projet de société qui guide sa ligne éditoriale mais aussi les actions de la Fédération de l’Entraide Protestante et de ses adhérents.

Un climat d’insécurité et la menace d’attentats terroristes planent sur la France et alimentent la peur chez de nombreux citoyens. Ceci pourrait influencer leurs votes dans les élections présidentielles et ouvrir les portes à des candidats extrémistes. Ce n’est ni la première ni probablement la dernière fois dans l’histoire que la peur motive des réactions inappropriées. Il y a un peu plus de 2700 ans, une menace lourde pesait sur le petit état de Juda, qui luttait afin de garder un minimum d’indépendance vis-à-vis de son voisin, la super-puissance Assyrie(1). Le gouvernement était pris au dépourvu et cherchait frénétiquement des issues. Dans ce contexte difficile, une voix solitaire s’élevait pour appeler le peuple à reconsidérer ses choix. Ses écrits se lisent comme une série d’articles postés semaine après semaine sur un « blog ». Il écrit au plus fort de la panique : « Ne parlez pas de complot chaque fois que ces gens parlent de complot. N’ayez pas peur de ce qui leur fait peur. N’ayez pas peur d’eux.

Reconnaissez que c’est le Seigneur de l’univers (…) que vous devez respecter, c’est de lui que vous devez avoir peur  »2. Ésaïe ne proposait pas de solution miracle, mais il avait confiance dans le Dieu créateur qui avait noué une relation privilégiée avec le peuple d’Israël. La peur est un mauvais conseiller et les paroles d’Ésaïe résonnent encore aujourd’hui comme un appel à faire des choix responsables.

2700 ans plus tard, dans la continuité de cette analyse, que pouvons-nous dire à nos concitoyens sur la peur qui semble les envahir  ? Voici quelques éléments de réflexion. Le pire n’est jamais certain  : la crainte de perdre notre confort et nos certitudes amplifie notre perception des dangers. Dans chaque crise, il y a bien sûr des dangers, mais aussi des opportunités. Notre vie ne se réduit pas à nos possessions : à s’agripper à nos biens, nous ne réussirons ni à les garder, ni à en jouir de manière paisible. Au contraire, en prenant une distance raisonnable visà-vis d’eux, nous serons probablement plus heureux.

L’ étranger n’est pas forcément un ennemi. C’est plutôt une méconnaissance de l’autre qui nous le rend étranger. Si nous parlons et partageons, nous comprenons qu’il est semblable à nous ; si nous dépassons les différences culturelles, celles-ci nous enrichissent ! La violence n’est pas la bonne réponse à la peur. Comme deux chiens étrangers qui grognent à leur rencontre, nous pensons que l’autre nous veut du mal ; en fait, il a aussi peur que nous ! Un simple geste d’hospitalité et de fraternité brise le cercle de la méfiance. La désignation de boucs émissaires ne règle pas le problème : elle permet simplement aux vrais responsables de courir toujours. Soyons donc libres, critiques, honnêtes, exigeants et responsables. Ne serait-ce pas un premier pas vers l’évacuation de nos peurs ?

André Pownall et Jean Fontanieu, Membres du comité de rédaction de Proteste

(1) Ancêtre de l’Irak moderne