À Marseille, des collectifs militants de défense du droit des mineurs non accompagnés ont engagé des démarches judiciaires contre le Département. Le dialogue étant compromis, le Département a contacté les représentants de toutes les religions identifiées. La directrice de Marhaban raconte comment l’association s’est engagée aux côtés d’autres, membres de la FEP, dans une belle expérience locale de plaidoyer.
Quand le Département a appelé la pasteure du temple de Grignan pour essayer de trouver des solutions au problème de l’hébergement des MNA, elle a immédiatement contacté le groupe FEP Marseille. Par chance, nous venions de revoir notre organisation ; notre pastorale s’est emparée du sujet pour discerner ce que nous étions capables de proposer. Nous avons fait appel à des paroissiens professionnels de l’Aide sociale à l’enfance susceptibles de nous apporter leur expertise parce que Marhaban prend en charge l’apprentissage de la langue, la rencontre, etc. mais pas du tout l’hébergement.
Nous avons interrogé les jeunes pour essayer d’identifier leurs besoins, et rencontré les catholiques qui avaient eux aussi été sollicités. Avec la conseillère épiscopale chargée des questions diaconales, nous nous sommes accordés sur les principes éthiques d’une possible action commune et avons constitué un comité œcuménique pour travailler sur ce projet.
Un nouveau statut juridique créé
Le principe des familles d’accueil, extrêmement contraignant, ne nous a pas semblé envisageable. Certaines familles allaient vouloir s’engager de façon solidaire mais pas toutes seules. Nous avons proposé au Département de créer un nouveau statut juridique d’accueillant bénévole : les familles assureraient le gîte et le couvert, moyennant une indemnité, mais la dimension d’accompagnement serait laissée aux professionnels de l’Aide sociale à l’enfance. Cette solution permettrait de soulager les familles et d’avoir le meilleur accompagnement possible pour les jeunes.
Le Département a créé un nouveau statut d’hébergement citoyen solidaire et nous avons rencontré plusieurs maisons d’enfants pour présenter ses avantages. Cinquante places se sont libérées. C’était une victoire car l’ASE, milieu très professionnel, s’ouvrait au bénévolat, malgré les nombreuses résistances.
Un petit rouage qui a fait sa part
Nous avons présenté le statut aux communautés protestantes et catholiques. Une dizaine de familles se sont engagées dans l’expérimentation. Les collectifs militants qui adoptaient une ligne dure – c’est grâce à leur positionnement que le Département a bougé – étaient réticents mais, par la suite, plusieurs militants sont devenus hébergeurs citoyens solidaires.
Nous avons l’impression d’avoir été un levier, d’avoir été là au bon moment, un petit rouage qui a fait sa part, tout simplement. Nous avons construit et expérimenté un modèle qui a été mis en place dans d’autres départements lorsque les forces de proposition locales étaient présentes, c’est une grande satisfaction pour nous, même si tout n’a pas été facile. Sur le papier, c’est le gîte et le couvert, mais nous n’avons pas anticipé que ces enfants, que nous supposions relativement stables, avaient eu des parcours traumatisants. Des familles ont dû gérer des situations psychologiques très difficiles.
Reste maintenant à développer le plaidoyer au niveau local. Un plaidoyer crée l’occasion de se mettre ensemble autour de la table, de se demander ce que l’Évangile nous invite à faire, de nous réinterroger sur le sens de nos actions et d’oser accomplir notre rôle de citoyen.