Des traditions à respecter
Veillée de Noël au temple, repas en famille, foie gras, bûche aux marrons, sapin scintillant et son étoile dorée, chants de Noël, échange de cadeaux… Voici le rituel assez courant du réveillon de Noël. Pour le 25 décembre, en général, on change de lieu, souvent de famille, passant chez beau-papa et belle-maman et on recommence le rituel : culte de Noël (en option, tout dépend de l’heure du coucher…), dinde farcie, bûche aux marrons (encore elle !), échange de cadeaux (encore eux !)…
Pour certains, ces traditions sont des indétrônables de la fin d’année, pour d’autres, ces sacro-saints rituels sont dépassés. Et de fait, avec l’évolution de la société, les recompositions familiales, il faut souvent réinventer cette période de fête, cette période souvent tendue, cette période génératrice de joie nostalgique pour les uns, de stress pour les autres. Mais lorsqu’il est question de toucher à la tradition, au rituel de Noël, le constat est clair : nous avons sacralisé le moindre aspect de la fête – le réveillon dans telle famille, le 25 chez telle autre ; le menu qui ne doit subir aucune modification, aucun ajout ; le petit Jésus déposé délicatement à minuit dans la crèche : pas avant, pas après !
Chaque faux pas ou pas de côté semble être un sacrilège. Ces traditions que l’on considère comme ancestrales ne datent pourtant que d’un peu plus d’un siècle.
La famille avant tout
L’ethnologue Martyne Perrot, dans son Ethnologie de Noël, pose Noël comme fête ultime de la famille, de repli sur le cocon familial et a été mis en avant par la bourgeoisie d’alors pour plébisciter les valeurs qui lui tenaient à cœur et moraliser la société… et pour la faire consommer, quitte à la faire épargner spécifiquement pour Noël afin de s’acheter la fameuse dinde !
Une ode à la famille récupérée durant la Seconde Guerre mondiale par le maréchal Pétain, comme paroxysme des valeurs traditionalistes. Une fête durant laquelle il est important de remettre la femme à la cuisine et au bolduc, car c’est la mère de famille qui est garante du respect des traditions et coutumes : le repas, les cadeaux, la décoration, le lien familial. Ce lien familial que l’on semble vouloir détruire si on ose quelques remarques sur les us et coutumes. La tradition familiale est évoquée, créant ainsi disputes et stress… En 2024, une étude Preply révélait que, pour 33 % des Français interrogés, Noël est une source de stress.
Fuir la fête/fuir la famille
Ils sont de plus en plus nombreux à oser dire qu’ils préféreraient passer Noël seuls, quitte à inventer des maladies contagieuses ou des heures sup’ au travail pour avoir une bonne excuse d’éviter le repas de famille. Car Noël se doit d’être cette parenthèse enchantée, elle doit être cette fête de la joie, du rire, du partage. Mais :
– est-on obligé de se forcer à sourire quand rien ne va dans sa vie ? Et si on a le malheur d’arriver avec ses soucis à la fête, on gâche l’ambiance !
– est-on obligé de se forcer à vivre (ou plus exactement à survivre) à cette réunion familiale qui va tourner au vinaigre après quelques verres ?
Un Noël idéalisé
Toutes ces questions ne se posaient pas il y a encore quelques années, car Noël, en famille, c’est sacré, c’est un temps à part, un temps idéalisé comme l’écrivait si bien Charles Dickens dans ses Esquisses de Boz, en 1836 : « Un repas de Noël en famille, nous ne connaissons rien dans la nature qui soit plus merveilleux. Il semble y avoir une magie dans le nom même de Noël. Les jalousies et les discordes mesquines sont oubliées : les sentiments de […]
