ANTIRACISME MORAL

Pendant longtemps, la vision dominante dans l’antiracisme était une conception individuelle et morale du racisme : il serait le fait de personnes mal informées ou adhérant à une doctrine raciste et/ou portées par une idéologie violente. Pour combattre le racisme, il suffirait de sanctionner leurs débordements et changer leurs mentalités par l’éducation.

ANTIRACISME POLITIQUE

Plutôt que de seulement dénoncer les dérives individuelles, l’antiracisme politique – porté par des nouvelles associations issues des banlieues et créées par des personnes victimes de racisme – met en avant que les institutions (l’État, la police, l’administration, l’école, les entreprises, mais parfois aussi les associations ou les églises…) distribuent inégalement les places, le pouvoir et les richesses… Cela se fait la plupart du temps sans que les personnes affichent pour autant des convictions «racistes». Ce racisme est diffus, souvent discret, les personnes « blanches » n’en ont en général pas conscience. Il y a un effet de système, d’où aussi les termes de racisme systémique ou institutionnel. Il ne faut pas seulement sanctionner et éduquer mais aussi changer les institutions qui distribuent inégalement.

PERSONNE RACISÉE

La sociologue française Colette Guillaumin invente en 1972 le mot « racisation » pour désigner une assignation – un enfermement par les autres dans une identité supposée par une apparence physique réelle ou fantasmée et/ou une filiation ou une généalogie réelle ou fantasmée. Cette assignation entraîne des discriminations, des préjugés et des inégalités. Contrairement au terme race, qui renvoie à des données prétendument biologiques, le terme « racisé » évoque une construction sociale et politique que subit la personne. Même si les races ont disparu, elles peuvent continuer à exister dans la tête des gens.

RACISME D’ÉTAT

Citée en 1976 par Michel Foucault au Collège de France, l’expression « racisme d’État » n’implique pas que les régimes démocratiques occidentaux sont semblables aux États qui ont, au cours de l’histoire, inscrit la hiérarchie des races dans leurs textes fondateurs. Elle souligne que le racisme imprègne et structure en profondeur les institutions d’État – avec des habitudes prises parfois à l’époque coloniale – défavorisant ou excluant systématiquement certaines populations. Ces mécanismes échappent au regard, se pratiquent le plus souvent de manière involontaire et légale, parfois à l’insu même des agents de l’État. Par exemple les pratiques répétitives, routinières et discriminatoires de la police quand elle pratique le contrôle au faciès ou l’affectation de moins de moyens dans des départements – la Seine-Saint-Denis, par exemple – où habitent le plus grand nombre de personnes issues de l’immigration.