Ne pas comprendre le langage administratif, ne pas saisir le sens d’une démarche sont un véritable handicap dans notre société. Dans le jargon des assistantes sociales et assistants sociaux, on appelle cela « la précarité administrative ». « On nous demande beaucoup de choses en tant que citoyens et contribuables », développe Corinne Feusier, assistante sociale au Centre social protestant (CSP) – Vaud. « C’est à nous de gérer notre fiscalité. Dans le domaine de la santé, il faut faire suivre des factures, être à jour avec ses primes. »
Une méconnaissance du système, et les usagers et usagères peuvent se retrouver perdus, avec des conséquences parfois très coûteuses. Ne serait-ce que du fait de ne pas connaître l’existence de certaines aides. « Dans les années 2000, on a commencé à parler d’ »alphabétisme financier » et du problème de l’illettrisme financier », résume-t-elle. Cela s’est amplifié avec la numérisation de nombre de prestations administratives. Les difficultés liées à l’usage des nouveaux outils informatiques – l’illectronisme, mot-valise formé d’ »illettrisme » et d’ »électronique » – ne font que grossir les rangs des précaires administratifs. « La société attend de nous un certain nombre de savoirs. Si on ne les a pas, par quel biais les acquérir ? », s’interroge Corinne Feusier. « Les administrations commencent à en prendre conscience. Cette année, par exemple, l’office d’impôt vaudois a mis en place une formation. Ces « sessions découvertes » pour remplir sa déclaration d’impôt en ligne ont été prises d’assaut et rapidement complètes. »
Un vrai blocage
Une autre réalité inquiète les spécialistes de l’aide. « Face à une charge administrative de plus en plus conséquente et au temps qui n’est pas extensible, certaines personnes […]