Le projet de loi de finances (PLF) est le plus vert que la France ait jamais eu. Paroles d’experts. Pourtant, si les ONG reconnaissent l’effort, la plupart estiment que ce ne sera pas suffisant pour stopper le réchauffement climatique. Pour leurs représentants, comme pour les experts, celui-ci n’est cependant “pas à la bonne échelle”. Il serait même incohérent face à la crise climatique, rapporte Sud-Ouest. “Ça va dans le bon sens”, mais ça reste “un budget vert pâle, et on va le dynamiser”, a expliqué Anne Bringault, directrice des programmes de Réseau action climat (RAC), mardi 3 octobre devant des médias.
Avec 7 milliards supplémentaires, le total des financements alloués à la transition écologique avoisinera les 40 milliards d’euros. Le budget, dont l’examen par l’Assemblée commencera le mardi 10 octobre, sera débattu le 17 octobre. Mais selon la quarantaine d’associations fédérées dans le RAC, le texte multiplie les contradictions. Il serait même riche de mesures qu’il ne contient pas.
Des mesures plus adaptées mises de côté
Selon Contexte, un site spécialisé dans le suivi des politiques françaises et européennes, qui s’appuie sur un rapport confidentiel sorti en mai, l’Inspection générale des finances a testé dix mesures d’adaptation de la fiscalité aux exigences de la transition écologique. Celles-ci seraient susceptibles de rapporter 8 milliards d’euros par an d’ici 2027, pourtant, elles sont peu nombreuses à avoir été retenues dans le PLF 2024.
Élise Naccarato d’Oxfam France affirme que le budget, insuffisant, comporte encore trop de “financements néfastes pour l’environnement et la biodiversité, dont le montant a été estimé à 22 milliards d’euros en 2022”. Jean-François Julliard, de Greenpeace, parle de régressions. Il fait notamment référence à “une annonce de sortie du charbon à l’horizon 2027, en recul par rapport aux engagements préalables d’Emmanuel Macron”.
Manque d’incitation à la sobriété
Si l’obligation, dès 2024, pour l’État de programmer pluriannuellement les financements de la transition écologique est saluée, les ONG attaquent d’autres points. “Avec pas de taxe sur les billets et un kérosène taxé à zéro, le train est 2,6 fois plus cher que l’avion au kilomètre”, fulmine Élise Naccarato. MaPrimeRénov’ n’est pas épargnée. En effet, si son enveloppe augmentera de 1,6 milliard d’euros (pour atteindre 5 milliards en 2024), cet argent servira encore à financer des aides limitées à un changement de chauffage ou de fenêtres.
Pour Delphine Mugnier, co-présidente de CLER Réseau pour la transition énergétique, “il faut stopper ces travaux mono-gestes” pour effectuer “un recentrage sur la rénovation globale et performante des logements […] celle qui divise par trois ou quatre la facture énergétique”. L’absence d’incitation à la sobriété est également montrée du doigt. Les ONG auraient vu d’un bon œil la mise en place d’un “malus masse” sur les voitures les plus lourdes, qui consomment le plus de carburant. “Or, un véhicule électrique de 1,9 tonne a le même impact qu’un véhicule thermique de 1 tonne”, précise Michel Dubromel, co-pilote du réseau Énergie de France Nature Environnement (FNE).
Un bouclage budgétaire flou ?
Dans ce contexte, Réseau action climat soumet des idées pour mettre plus d’argent public au service de la transition énergétique. Parmi elles figurent, notamment, la taxation des superprofits et la mise en place d’un ISF climatique, note Sud Ouest. Deux mesures qui rapporteraient respectivement 8 à 12 milliards d’euros et 17,6 milliards d’euros par an. L’impôt de solidarité sur la fortune serait ainsi proportionnel à l’impact climatique du patrimoine. “L’argent pour la transition existe, la volonté politique manque”, commente Soraya Fettih de 350.org.
Et puis, selon Damien Demailly, directeur général adjoint de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), le bouclage budgétaire reste flou. Et ce, dès 2024. Selon lui, la rallonge de l’État prévue pour les infrastructures ferroviaires, faible face aux besoins, pose question. Un exemple parmi d’autres.