La prise de conscience actuelle est à la mesure de l’aveuglement général d’autrefois. Après de longues années de silence, plusieurs actrices connues ont eu le courage de dénoncer les comportements de grands noms du cinéma ou du théâtre français. Judith Godrèche et Adèle Haenel ont dénoncé des violences sexuelles subies alors qu’elles étaient mineures. Un procès est requis contre le réalisateur Christophe Ruggia, pour les faits rapportés par Adèle Haenel, relate Ouest-France. Benoît Jacquot, lui, est visé par une enquête pour viols sur mineure. D’autant que Judith Godrèche n’est pas la seule actrice à parler de violences le concernant. Deux autres l’accusent de violences physiques, verbales et psychologiques, précise La Dépêche du Midi. Mais comme Jacques Doillon, Benoît Jacquot nie les faits qui lui sont reprochés. Il en va de même pour Philippe Caubère, visé par des soupçons de viols et d’agressions sexuelles sur trois mineures sur la période 2010-2021.

Ces derniers mois, d’autres grands noms du cinéma français ont été mis en cause dans le #MeToo français. C’est le cas de Gérard Depardieu et de Nicolas Bedos et, comme ce fut, plusieurs années avant eux, celui de Roman Polanski. Cette fois, l’ampleur du phénomène est telle que Télérama estime que le septième art hexagonal traverse une crise sans précédent. Au point de remettre en cause certains de ses réalisateurs, mais aussi certaines de ses représentations. Après plusieurs semaines d’enquête, l’hebdomadaire dénonce un système entretenu pendant des années au détriment de jeunes actrices d’autant plus inspirantes qu’elles étaient soumises au génie du créateur ainsi qu’à ses assauts.

“Inégalités de pouvoir”

“Tous ces milieux très verticaux, très hiérarchisés, où il y a beaucoup d’inégalités de pouvoir, sont des milieux favorables à la prédation”, explique Alice Augustin, grand reporter au magazine Elle, à France 24. “En coulisses, le septième art a servi de décor, voire de prétexte, à des abus”, renchérit Télérama. S’ils sont présumés innocents tant qu’ils n’ont pas été définitivement condamnés, les auteurs de violences quelles qu’elles soient les reconnaissent rarement avant que le couperet ne tombe. Au mieux, ils consentent à reconnaître des relations consenties.

Grâce à Judith Godrèche et à des spécialistes, franceinfo explique de façon très détaillée le mécanisme de l’emprise. Un terme qui englobe tous “les moyens qu’un agresseur met en œuvre pour garder sa proie, pour qu’elle ait du mal à en parler autour d’elle : lui faire penser que c’est elle qui le veut, qu’elle est d’accord. Il l’isole, de ses amis et sa famille”, détaille Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire des violences faites aux femmes de Seine-Saint-Denis. “Un agresseur crée de l’impunité autour de lui. Il vit dans un milieu protecteur, complaisant, qu’il soit artiste, entraîneur de sport”, poursuit Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol (CFCV).

2017 et la première vague #Metoo

Mais depuis 2017 et la première vague du mouvement #Metoo, les choses changent petit à petit et les oreilles sont de plus en plus attentives à ce que disent les victimes de violences sexuelles ou physiques.