Un monde «est en train de disparaître», celui «qui, après avoir écarté l’attente d’une béatitude éternelle, l’avait sécularisée dans les espoirs d’un bonheur de vivre et de bien vivre ensemble dans un futur prévisible». Ce n’est pas seulement la pandémie mais toutes sortes de signes déjà décelables depuis longtemps qui font du moment actuel «l’acmé du conflit entre l’individu roi (mais nu), auto-entrepreneur de sa vie, et l’État souverain provoquant autant de crainte que de fascination». Pour Jean-Pierre Rive, ce moment pourrait être celui du choix entre deux conceptions de la vie: «’bios’: la vie organique destinée à la disparition et à la reproduction dans la répétition. Et ‘zoé’: la vie toujours nouvelle, créatrice qui, contre la dégradation inéluctable du biologique, persiste et imagine des itinéraires inédits».

Conférence donnée dans le cadre du festival Les chemins de Tolérance, le 7 août 2021 à Valleraugue.

Je ne voudrais pas avancer masqué, donc j’annoncerai d’emblée quelles sont les influences envers lesquelles je suis redevable.

Tout d’abord Jacques Ellul et son complice bordelais Bernard Charbonneau, Ivan Illich. Et plus près de nous: Olivier Rey, Pablo Servigne (adepte de la collapsologie), Jean-Pierre Dupuy et le catastrophisme éclairé, qui signale que si notre ère qualifiée d’anthropocène est menacée d’effondrement, elle réserve des possibilités de renouveau, de renaissance inattendues. Si bien que si la lucidité nous condamne au pessimisme, la volonté (si elle demeure créatrice) nous permet un optimisme qui, sans être béat, ménage un avenir à l’humanité. Je ne vous cacherai pas non plus mon attachement aux travaux de Serge Latouche sur la décroissance et, puisque notre festival a pour emblème Les Lumières en Cévennes, mon tropisme quelque peu rousseauiste. Pour conclure cette série de références, je la complèterai par celle qui me détermine fondamentalement, à savoir le corpus biblique, source incessante de réflexion et de renouvellement de nos imaginaires.

Pour développer le thème de cette conférence, je m’appliquerai à commenter le texte de présentation dans le livret du Festival.

«Les dangers multiples menaçant les démocraties, pandémies, réchauffement climatique, terrorisme, guerres nucléaires mettent à rude épreuve notre vie commune. Le moins d’État souvent mis en avant dans les sociétés libérales se  […]