Cela fait plusieurs semaines que la centrale de Zaporijjia, en Ukraine, est au cœur de l’actualité et de toutes les préoccupations. Et pour cause : située au sud du pays, exploitée par les Ukrainiens, mais contrôlée par l’armée russe, cette centrale nucléaire, dotée de six réacteurs de 1000 mégawatts chacun, et en outre la plus puissante d’Europe, est régulièrement la cible de bombardements, faisant craindre un accident de grande ampleur. La communauté internationale est vivement inquiète, tandis que Kiev et Moscou s’accusent mutuellement d’être à l’origine des frappes sur le site. Comme le précise La Croix, des experts de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) sont en route vers la centrale pour une mission d’inspection inédite.
“Substances radioactives”
“Le jour est venu, la mission de l’AIEA vers Zaporijjia est désormais en route. Nous devons protéger la sécurité de l’Ukraine et de la plus grande centrale d’Europe”, a annoncé, lundi 29 août, Rafael Mariano Grossi, le patron de l’AIEA. Ce sera “la mission la plus difficile de l’histoire de l’AIEA” (créée en 1957), a prévenu le ministre des Affaires étrangères ukrainien Dmytro Kouleba. “L’AIEA a déjà réalisé des missions en Ukraine pendant la guerre, par exemple à Tchernobyl du 25 au 28 avril 2022, mais les militaires russes avaient déjà évacué le site”, rappelle auprès du journal catholique Michaël Mangeon, chercheur associé au laboratoire Environnement, ville et société (EVS). Et d’expliquer : “La situation de la centrale de Zaporijjia, occupée par les Russes et exploitée industriellement par les Ukrainiens, est totalement inédite.”
Le jeudi 25 août, la société publique ukrainienne Energoatom a annoncé que la centrale s’était retrouvée “totalement déconnectée” du réseau électrique ukrainien, accusant “les actions des envahisseurs” russes d’en être les responsables. Le lendemain, l’entreprise a finalement indiqué qu’elle était parvenue à rétablir le raccordement du site au réseau électrique national. Mais le samedi 27 août, l’opérateur ukrainien Energoatom a annoncé que “l’infrastructure de la centrale a[vait] été endommagée et [qu’]il exist[ait] des risques de fuite d’hydrogène et de pulvérisation de substances radioactives”.
“Rejets de type Fukushima”
“Il est si important que les troupes russes quittent la centrale et les zones voisines, et que la menace de bombardement de la centrale ou des lignes électriques qui sont reliées disparaissent”, a récemment déclaré le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, cité par France Info. Quels sont les risques de catastrophe nucléaire ? Le Monde note que les réacteurs ne sont pas les uniques cibles sensibles de la centrale, citant le chef de l’administration civile et militaire mise en place dans cette région du sud de l’Ukraine contrôlée par les Russes, Ievhen Balytsky, lequel a assuré que “plusieurs tonnes” de déchets radioactifs sont stockées sur le site de la centrale.
Pour Bruno Chareyron, directeur du laboratoire de la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad), également cité par Le Monde, “une catastrophe nucléaire sur ce type de réacteurs ne conduirait pas à des mécanismes de rejets radioactifs identiques à ceux du réacteur n°4 de Tchernobyl. (…) Cependant, on peut envisager sérieusement des scénarios, (…) conduisant à des rejets de type Fukushima”.