Par Elisabeth Brinkman, pasteure à Bergerac
La famille Ali compte 5 personnes : Mahmoud, le père, la soixantaine, retraité ingénieur en électricité ; Mariam, la mère, a été fonctionnaire, dans le secrétariat. Warda est leur belle-fille. Elle a 28 ans et est informaticienne. Son mari Mohamed a été arrêté en 2013 et personne n’a de ses nouvelles. On peut imaginer le pire… Et puis il y a les 2 petits de Mohamed et Warda : Mayar, un petit garçon de 5 ans, et sa sœur de 4 ans, Mirna. Pour l’instant, la famille ne parle qu’arabe (et un tout petit peu l’anglais), mais veut apprendre le français. Warda rêve de pouvoir faire une formation d’infirmière. À la rentrée, les petits vont commencer l’école ; pour eux l’apprentissage du français ira sans doute très vite !
Les Ali ont fui la Syrie en guerre : ils vivaient dans une banlieue de Damas prise en tenaille entre 2 milices. Leur maison a brûlé il y quelques années, puis leur fils aîné a été arrêté à cause de son engagement politique, a été relâché et s’est exilé en Angleterre où il travaille actuellement. Depuis cet exil, Mahmoud est harcelé sans arrêt par les autorités. Leur deuxième fils a « disparu » et leur fille Maram a également dû quitter le pays à cause de ses activités politiques. Elle est en 3e année à la Sorbonne, dans un cursus français-arabe. Reste à Damas leur autre fille pour laquelle ils sont très en souci.
La famille Rom compte 3 personnes : Yahya le père, la trentaine, était fermier près de Homs. Il est marié à Loubana et le couple a une petite fille de 16 mois, Khadija. Après le bombardement de leur ferme il y a 2 ans, ils se sont réfugiés au Liban. Khadija est née dans un camp. Comme d’autres membres résidaient en France, ils ont décidé de demander l’asile politique à ce pays. Apprendre le français et un métier sont leurs priorités, tout comme trouver un endroit où leur petite « Joujou » puisse grandir en paix.
Les 2 familles sont venues en France avec un visa, soit d’un an, soit de 2 mois, ce qui permet de mettre en route les premières démarches administratives.
Accompagnement
Pour accueillir et entourer ces personnes au mieux, un collectif s’est mis en place, où travaillent ensemble l’Entraide, la municipalité de la Force, la Fondation John Bost et l’association Mosaïque, section du foyer laïque de la Force qui fait un énorme boulot d’accompagnement au quotidien. D’autres personnes se sont jointes soit à titre personnel, soit via RESF, REVA, Croix rouge etc. Des bénévoles arabophones sont venus pour aider à traduire, car sinon comment expliquer au médecin son souci de santé, ou trouver de la colle forte pour réparer une petite sandale ?
Les premiers contacts avec la préfecture ont été pris ; le fait d’avoir des visas facilite les procédures, mais la demande officielle à l’OFPRA pour qu’ils bénéficient du statut de réfugiés peut prendre jusqu’à un an dans le meilleur des cas. Petit à petit ils prennent leurs marques, mais il faut du temps. Nous faisons au mieux pour les soutenir et accompagner au quotidien sans toutefois non plus les submerger.
Aide
Je suis extrêmement touchée par l’élan de générosité qui a jailli dès qu’on a annoncé dans une première réunion de constitution du collectif, début juillet, la possible arrivée de 8 personnes. Nous avions identifié plusieurs «pôles» où les familles ont besoin d’être aidées, au moins dans un premier temps : transport (un véhicule 7 places nous est mis à disposition), aide médicale (mauvais état général, stress post-traumatique), accompagnement aux courses, gestion du budget, apprentissage de la langue etc…. Beaucoup de personnes ont proposé leur aide et nous les en remercions vivement. Nous avons constitué des «équipes» pour chaque pôle. D’autres nous ont fait ou promis des dons, ce qui est extrêmement précieux car effectivement nous étions déjà à quasiment à 1000 euros de dépenses pour les 2 premières semaines : les billets de train Paris-Libourne, et les autres déplacements, les courses, un abonnement internet pour pouvoir rassurer la famille restée au pays et avoir quelques nouvelles… tout ça chiffre vite. Et ça prend 3 ou 4 mois avant que toutes les allocations soient mises en place et en attendant il faut bien que ces familles puissent vivre.
Vous pouvez faire un don : par chèque à l’Entraide du Bergeracois, avec au dos la mention, « Réfugiés ». Votre don est déductible des impôts. Si vous voulez mettre en place un virement « parrainage », c’est le trésorier Gérard Claeyman qui vous fournira les données IBAN (gerard.claeyman@wanadoo.fr).
Une très belle aventure
Notre action est certainement une goutte dans l’océan. Mais au bout d’un mois voir un petit bout de chou, qui n’était pas sorti de la maison depuis un an, faire fièrement le tour du pavillon sur son petit vélo, voir une maman exténuée et rongée par l’anxiété au sujet de son mari disparu, se mettre sur son trente-et-un pour simplement aller passer un aprèsmidi au parc ou faire les courses au supermarché, cueillir au bout de quelques jours un premier sourire, un premier « bonjour, au revoir, ça va bien ? », être accueilli avec un thé, un café parce que même si on n’a rien on offre quelque chose à celui qui arrive…. Qu’est-ce que ça vaut le coup ! Merci à Mahmoud, Mariam, Warda, Mayar, Mirna, Yahya, Loubana et Khadija pour la fraternité qu’ils nous permettent de vivre !