L es journaux m’ont surprise : «Dans la cathédrale, un concile protestant». Il fallait être de Bâle pour comprendre. La cathédrale est en effet, depuis le 16e siècle, le lieu principal de la communauté protestante. Et le Concile de Bâle (1431-1449) fait partie de l’histoire de la ville, tout comme le grand rassemblement œcuménique de 1989, Justice, paix et sauvegarde de la Création.

Sous le thème Libérés – liés – engagés, l’Assemblée générale a étudié des documents pour les adopter et les proposer aux Églises membres. Pour ce faire, nous nous sommes laissé porter par des cultes communs où la diversité des traditions liturgiques, linguistiques et musicales des différents pays a contribué à la joie de tous. Comment pense-t-on, dans ces différents pays, la spécificité protestante qui nous relie ? Sommes-nous en communion et, si oui, quelles conséquences cela implique-t-il ? Pouvons-nous, pour la première fois dans l’histoire, parler d’une voix commune pour commémorer la fin de la Grande Guerre, il y a 100 ans ? La réponse fut oui. D’autres dossiers trouvent un accueil positif. En premier lieu, le grand chantier autour de la communion ecclésiale. Il concerne l’affirmation d’une catholicité de l’Église une, et la nécessité de se donner des moyens historiques pour sortir des limites nationales. Un synode européen ? Une Charte spirituelle qui nous relie et nous lie ?

Les réflexions théologiques continueront à explorer comment articuler entre elles les affirmations de la foi et les structures ecclésiales. Mais, les Églises protestantes cherchent aussi à servir la société. Ensemble nous sommes confrontés aux questions bioéthiques, à l’arrivée de réfugiés, aux mouvements migratoires, au dialogue avec les anglicans, les orthodoxes… sans oublier les autres religions présentes en Europe. Nous ne sommes pas bien habitués à ce que le protestantisme se donne les moyens de parler d’une voix commune. Mais en Europe, depuis 1973, le défi est lancé : attester ensemble cette Église une que nous confessons dans la foi !

Le dialogue invite à l’action de grâces

Le dimanche 16 septembre, au cours du culte, un document important a été signé entre le président suisse de la Cepe, le pasteur Gottfried Locher, et le président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, le cardinal Kurt Koch. L’accord porte sur l’ouverture d’un dialogue entre la Communion des Églises protestantes en Europe et l’Église catholique romaine. Quel pas œcuménique ! L’affirmation qu’il est bon de se retrouver à l’avenir afin d’étudier s’il est possible de regarder autrement les différences entre Églises. Le pari : changer nos appréciations et accueillir les différences qui demeurent comme des différences non séparatrices. C’est ainsi que le pasteur Locher rappelait, non sans humour, que l’ordination des femmes au ministère de pasteur ou d’évêque n’est pas négociable; et le cardinal Kurt de répondre sur le même ton : et pour nous, c’est le lien à l’évêque de Rome qui ne peut être marchandé. Des points comme ceux-ci sont-ils causes de division ou expression légitime d’une même foi ?

Ce qui est certain : entre Églises protestantes, un tel cheminement a déjà été très fructueux. Oui, nous avons des sensibilités liturgiques, des accentuations théologiques diverses. Mais, réformés et luthériens, méthodistes et vaudois se savent appelés par le même Seigneur, pour une même mission. La communion ecclésiale est, avant tout, un lieu de célébration dans l’écoute de la Parole de Dieu; elle inclut l’accueil réciproque à l’unique table, celle du Christ. Une telle reconnaissance demande d’être humblement à l’écoute les uns des autres, disponibles pour apporter les changements nécessaires en vue d’un témoignage commun.

En France, nous nous sommes décidés à faire advenir l’Église protestante unie. Au niveau européen, nous devons continuer à chercher comment approfondir et structurer notre communion ecclésiale. Rendez-vous donc dans 6 ans pour une nouvelle Assemblée générale. Entre temps, il s’agit de travailler pour favoriser la réception des orientations déjà décidées et pour la poursuite des grands objectifs.