Au sein du groupe Abraham, nous vivons ensemble des temps de dialogue et de connaissance mutuelle, la lecture de nos écritures sur des sujets transversaux, des « balades urbaines » pour faire visiter nos lieux de culte, des conférences publiques ou des animations destinées aux jeunes, mais des repas, c’est beaucoup plus rare ! D’où ce projet : franchir une étape de plus et manger ensemble.
Cette préparation a été l’objet d’un « débat mouvant » animé par une compagnie de théâtre « Le collectif X », puis d’un théâtre Forum destiné à mettre en scène les questions qui se posent lorsque juifs, musulmans et chrétiens décident de manger ensemble. Nous avons finalement décidé d’organiser un grand buffet en demandant à chacun-e d’apporter les mets de son choix, c’est-à-dire conformes à ses pratiques et ses rites alimentaires. Ainsi, nous avons mangé ensemble. Certes, nous n’avons pas consommé les mêmes plats, mais nous avons partagé un même repas autour des mêmes tables.
Et puis, avec le sourire, nous avons remarqué que certains s’étaient laissé tenter par quelques petites transgressions. Pour ma part, j’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir et déguster des plats venant d’une autre tradition que la mienne. Cela est resté dans les souvenirs un bon moment fraternel, tant il est vrai qu’autour d’une table on partage davantage qu’un repas ; en particulier, des attentions mutuelles, voire des confidences
Passerelles
Cette expérience m’a amené à m’interroger sur ce qui fait qu’à un moment donné un groupe devient communauté. Le mot suggère qu’il s’agit de mettre en commun quelque chose, et non pas de devenir tous pareils et de se couler dans le même moule, contrairement à ce que l’on s’imagine parfois. Or une mise en commun n’est intéressante que si tous n’apportent pas la même chose.
Une communauté n’a de sens que lorsque chacun.e est reconnu.e comme une personne singulière et lorsque les différences sont vécues comme des passerelles plutôt que des barrières. Et cela est un long chemin nécessitant un patient travail sur soi.