Des bénévoles représentant une dizaine d’associations membres de la FEP qui ont, dans leurs attributions, la distribution alimentaire, sont venus d’Orléans, de Nantes, de La Rochelle, de Strasbourg, de Paris, de Vincennes, de Sens, de Reims et du Havre, le 25 septembre à la Maison du protestantisme à Paris. Ils étaient invités par le groupe Aide alimentaire de la FEP, créé en 2016, qui poursuit deux objectifs : le suivi de l’habilitation liée à la distribution et la réflexion sur la promotion de l’équilibre alimentaire.
Les réflexions ont porté autour des questions éthiques et sur les problématiques que soulèvent les pratiques de distribution et d’accès à l’aide alimentaire et ont été nourries par l’apport de deux universitaires.
Vincent Moriniaux, maître de conférence de géographie à l’université ParisSorbonne et au laboratoire Espace nature et culture du CNRS, a présenté les valeurs sollicitées par l’aide alimentaire et le principe de laïcité au regard de la diversité culturelle et religieuse des personnes bénéficiaires. Gilles Fumey, professeur de géographie à la Sorbonne et au CNRS, a soulevé la question de l’incidence des facteurs socio-culturels et environnementaux sur l’alimentation.
Des colis aux épiceries
« Les modalités de distribution ont beaucoup évolué ces dernières années. Les épiceries solidaires, où les bénéficiaires paient un tarif proportionnel à leurs revenus, ont partiellement remplacé les distributions de colis alimentaires. Les personnes choisissent ce qu’elles vont consommer. Leur posture est différente de celles qui reçoivent un colis alimentaire ; dans ce cas, elles sont actives et décident. Pouvoir décider participe à leur donner toute leur place et leur dignité », explique Florence Daussant-Perrard, co-organisatrice de cette rencontre.
Par ailleurs, les points de distribution encore en activité associent bien souvent un accueil convivial à la remise du colis alimentaire. « L’aide devient ainsi un moyen de promouvoir le lien social », ajoute-t-elle. Les structures proposent, par exemple, des ateliers où l’on apprend à cuisiner les produits alimentaires donnés et méconnus par les bénéficiaires. Ici, c’est la convivialité qui est alors centrale pendant ce temps de partage. « Il existe aussi de nombreuses associations où les bénévoles distributeurs sont également bénéficiaires de l’aide alimentaire », souligne Florence DaussantPerrard.
Mais l’articulation entre le respect de la dignité et les denrées données par les banques alimentaires françaises et européennes reste encore problématique. Les bénéficiaires sont parfois pris en étau entre leur réalité et les produits alimentaires proposés, qu’ils ne connaissent pas toujours, les injonctions des pouvoirs publics et de la société comme la recommandation des cinq fruits et légumes par jour ou la lutte contre l’obésité. Manger est pourtant un acte intime, c’est aussi une composante importante de l’héritage familial et culturel.
Donner une place centrale aux bénéficiaires
L’aide alimentaire implique de donner une place centrale aux bénéficiaires et non pas aux produits alimentaires à écouler. « Considérer l’ensemble des maillons de la chaîne qui composent l’aide alimentaire revient également à interroger les modes d’approvisionnement des produits. Pourquoi ne pas développer davantage de partenariats locaux, valorisant le soutien d’agriculteurs locaux plutôt que de bénéficier des « ramasses » issus de la surproduction de produits agricoles industriels invendus ? » a demandé Gille Fumey. « Réinterroger régulièrement le sens de notre engagement devient dès lors une de ses composantes », a conclu Florence Daussant-Perrard.