02Pousser la porte de la salle Beaulieu à La Grande-Motte, c’est vivre une expérience de l’accueil. Au premier abord, on peut se poser des questions : mais que font les protestants entre le boucher et le bar de quartier, à quelques mètres de l’ambiance surchauffée du bord de mer ? Bien sûr en temps normal, oublions un instant ce qui nous perturbe tant.

Ancien restaurant de la cité balnéaire, aujourd’hui salle de culte (entre autres), la salle Beaulieu ne peut pas laisser indifférent. Loin des temples classiques que nous connaissons tous, qu’ils soient anciens ou plus contemporains, ici la lumière méditerranéenne règne en maître, l’architecture de Jean Balladur s’impose.

Vous entrez pour un culte le dimanche matin, vous hésitez encore… au bout de la rue, la plage ! Bref, vous franchissez le cap, vous vous asseyez. Sourires chaleureux, accueil sur mesure : café et croissants.

La pasteure se lance. Où que vous soyez, physiquement ou spirituellement, dans la joie ou la tristesse, elle vient vous rejoindre là où vous êtes. La bénédiction termine le culte, certains partent très vite, mais beaucoup restent et c’est là que cette paroisse prend toute sa dimension. Dans un joyeux brouhaha, les bouteilles s’ouvrent, les gâteaux apéro recouvrent les tables. On discute de-ci de-là de la prédication, on donne des nouvelles des uns et des autres, mais surtout on s’intéresse à celui qui vient de franchir pour la première fois la porte. Avec une immense gentillesse et de l’intérêt pour qui vous êtes, chacun vient se soucier de vous. De fil en aiguille, le culte aura duré presque trois heures (temps convivial compris, bien sûr).

Être ensemble

Derrière ce portrait idyllique, se cachent bien sûr des difficultés. Il n’est pas toujours facile de réunir la communauté pour des moments conviviaux. Il y a peu d’engagés, mais ils le sont avec une forte implication. Le nouveau conseil presbytéral se réunit avec plaisir, chacun y a une parole libre, constructive qui devient un moment festif de rencontre et de partage.

D’ailleurs la nouvelle équipe ne manque pas de projets. Pour permettre de mieux ouvrir la salle Beaulieu, en particulier, tout le monde est au travail pour préparer un plan de rénovation et d’investissement. Le Littoral est un véritable lieu de brassage, de passage. Finalement, beaucoup de membres de la paroisse sont eux-mêmes « étrangers ». Pour Anne et son équipe « Dieu nous donne juste ce qu’il faut et avec ce juste ce qu’il faut, nous arrivons à avancer et à avoir des projets. »

Parmi cette communauté, il y a aussi ceux que l’on ne voit pas, présents uniquement aux mariages ou aux obsèques. Mais ils sont toujours présents au moins en gardant un contact téléphonique avec le pasteur. Personne n’est oublié, personne n’est laissé de côté : « le fil constant, c’est l’attention portée à l’autre » confie la pasteure Anne Heimerdinger.

Témoignage de nouveaux arrivants

Renate et Étienne Lemmel sont venus prendre leur retraite au Grau-du-Roi. Un hasard ? Pas tout à fait. Renate connaissait bien la région où elle venait enfant avec ses parents en vacances. Elle fait découvrir le pays à son mari. Leur première idée est de s’installer en Vaunage. En 2016, ils poussent la porte de la salle Beaulieu et entendent parler du projet Littoral. Il consistait à créer un réel poste pastoral sur le front de mer. Ils ont été séduits par ce projet qui mêlait tourisme et culte. Dans la semaine suivant le culte, ils achètent un studio au Grau-du-Roi pour suivre le projet. Aujourd’hui tous les deux sont pleinement engagés dans la paroisse et dans son ouverture au monde et à celui qui passe devant la porte.

Venez comme vous êtes

Ce slogan résume à lui seul la sensibilité de cette paroisse. Une paroisse qui n’a pas su se trouver de nom et qu’il est difficile de décrire. Le littoral ? Non. La petite Camargue ? Pas seulement. Historique ? En partie. Nouvelle implantation ? Aussi… L’Église protestante unie de Saint-Laurent-d’Aigouze, Aigues-Mortes, Le Grau-du-Roi, La Grande-Motte est une paroisse aux multiples visages. Elle est une des premières à décider de s’unir, c’est-à-dire de réunir plusieurs associations cultuelles pour n’en former qu’une seule.

Historiquement, les protestants sont plutôt dans les terres. Première raison, Le Grau-du-Roi est un village de pêcheurs d’origine italienne et La Grande-Motte est une cité de vacances créée ex nihilo à la fin des années 60.

Parmi les premiers investisseurs de la cité nouvelle, des Cévenols qui dès le début ont acheté des appartements de villégiature.

C’est le pasteur Wyrill, alors en poste à Saint-Laurent-d’Aigouze, qui voit en cette nouvelle ville un territoire à évangéliser. Il allait d’ailleurs sur les plages à la rencontre des vacanciers. Il se bat pour trouver un financement et pouvoir acheter une salle. L’Union nationale, alors de l’Église réformée de France, et quelques subsides suisses ont permis de réaliser ce projet. Pour les autres parties du territoire, il y a un temple à Saint-Laurent et à Aigues-Mortes. Pour le Grau-du-Roi, la situation est un peu différente. Le château Leenhardt, qui a été une colonie de vacances, accueillait pendant l’été les cultes. À la démolition des bâtiments, la mairie a mis à disposition des protestants une salle pour célébrer le culte tous les dimanches de l’été.

Voilà un reportage qui laisse sur sa faim. Il y a bien sûr des activités dont la liste exhaustive ne parlerait pas au lecteur. Il ne faut pas que lire, il faut vivre l’expérience de l ’accueil et de la rencontre sur ce territoire. Merci à Elsa Pandosy, Anne Heimerdinger, Renate et Étienne Lemmel d’avoir raconté leur paroisse et fait partager leur enthousiasme et leur générosité.