Pour fêter ses vingt ans, Théovie n’a pas voulu faire une grande fête, mais a préféré que cette journée soit un temps de rencontres, de témoignages, de bilan. En 20 ans, il y a eu des hauts et des bas, des moments de joie et aussi des difficultés. Il faut faire un point pour pouvoir préparer un avenir qui confirme les chemins déjà tracés et rêver d’autres routes pas encore explorées.
Mais finalement, c’est quoi, Théovie ? Au sein de l’Église protestante unie de France (EPUdF), tout le monde le connaît, mais que se cache-t-il derrière ce nom ? Le mieux est encore de laisser la page d’accueil du site nous donner les fondements de cette formation :
« Théovie propose gratuitement une formation sur les grands thèmes de l’existence à partir du message de la Bible.
Accessible à tous, Théovie invite chacun(e) à une démarche d’acquisition de connaissances, de réflexion personnelle et de recherche spirituelle. Théovie offre un parcours de formation libre et individualisé, avec possibilité d’un accompagnement. La formation peut être suivie individuellement ou dans un groupe. »
Retour sur l’histoire
Katharina Schächl revient sur le contexte qui a conduit la pasteure Martine Millet à créer Théovie. Suite au thème Débat 2000, 2000 débats, Martine Millet a l’idée de mettre la théologie à disposition de tous, c’est-à-dire d’aller à la ren contre, aux marges de nos Églises, de personnes qui aimeraient se former sans forcément entrer dans un temple. Pour que cela fonctionne, il y a deux points fondamentaux : d’abord utiliser un outil un peu nouveau, « internet », mais aussi changer de langage. Arrêter d’utiliser ce fameux patois de Canaan que même de bons protestants ne comprennent plus.
Pour la théologie, Martine Millet s’entoure de personnes compétentes de l’Église. Pour l’informatique, elle fait le choix audacieux de faire appel à Sandra Bellier, une professionnelle de l’e-learning. L’idée est de permettre à l’utilisateur de réfléchir, pas d’emmagasiner du contenu. Katharina précise bien : « Même si on passe par la connaissance et le savoir, les utilisateurs de Théovie trouvent eux-mêmes des pistes de cheminement dans la foi ou pas. »
Le site se met en place et les utilisateurs arrivent. Finalement, loin d’accueillir des nouveaux venus de l’extérieur, c’est le sérail qui répond positivement. Pour Katharina, « les marges de nos Églises, au final, sont dans nos Églises et ne s’adresser qu’ à l’extérieur ne suit pas le principe de la réalité de vie de nos communautés. »
Un service gratuit
Ce qui ancre Théovie définitivement dans le paysage de l’EPUdF, c’est le Synode national de Toulouse de 2008. Cette année-là, il y a environ 350 inscrits, souvent des personnes déjà engagées. Lors de ce synode, les délégués devaient déci der de la continuation ou de l’arrêt de ce service de formation. Le débat fut houleux. Ce sont les témoignages des utilisateurs présents au synode qui ont fait basculer la décision : Théovie continue. Dans cette décision, deux points importants : l’outil n’est plus exclusivement tourné vers l’extérieur, mais doit s’ouvrir aussi aux membres des Églises locales ; mais surtout la formation est gratuite (elle était payante à la création du site). Aujourd’hui un budget est alloué par l’Église pour le fonctionnement et la rémunération d’un temps plein avec un ministre et un mi-temps pour l’aide à la rédaction des modules. Tout le reste de la gestion de Théovie est réalisé par des bénévoles. En écoutant Katharina, on réalise très vite qu’elle est très attentive au bien-être de son équipe. « Tous sont déjà très engagés dans l’Église, à tous les niveaux, il ne faut pas les décourager en leur ajoutant un poids supplémentaire. »
Aujourd’hui, Théovie, c’est plus de 8 000 inscrits, une à deux inscriptions par jour, des collaborations avec l’Église unie du Canada. D’une formation individuelle à l’origine, des petits groupes se sont formés pour travailler ensemble et rompre parfois la solitude.
Retour d’expérience
Parmi ces inscrits, il y a un groupe particulièrement étonnant, c’est celui des détenus. Ce sont des aumôniers qui ont proposé l’utilisation de Théovie lors de leurs visites. La Fédération protestante de France (FPF) a édité il y a quelques années un opuscule à destination des prisonniers pour servir de base à une réflexion spirituelle. Théovie a l’idée de mettre une « pub » sur leur service de formation théologique. Cela a eu un énorme impact sur les nouvelles inscriptions. Dans certaines prisons, les détenus ont même voulu créer des groupes (ce qui ne va pas sans difficulté). C’est un public auquel personne n’avait pensé au départ de l’aventure. Katharina est particulièrement reconnaissante des échanges de courrier qu’elle a avec certains prisonniers. Elle réalise qu’ils ont besoin d’un échange avec l’extérieur, d’une parole échangée. Elle raconte l’histoire de ce prisonnier qui au départ lui envoyait des réponses aux questions sans organisation, écrites phonétiquement. Puis, petit à petit, son écriture change, sa pensée se réorganise. La lecture des textes des modules lui a donné une nouvelle façon d’écrire, une manière de se réinsérer dans la société. Il y a là l’exemple d’un réel cheminement humain et spirituel.
Qui est Katharina ?
Katharina Schächl est là pour animer les équipes de Théovie. Il faut trouver du contenu, trouver des auteurs ou en solliciter d’autres. Elle fait connaître Théovie en se déplaçant dans les communautés pour des conférences, des journées d’Église ou des retraites spirituelles. Des occasions pour faire connaître Théovie aux membres des Églises, mais aussi à un public plus large. Mais ce qui anime l’animatrice, c’est la mise en réseau. En accompagnant individuellement les utilisateurs qui commencent à éprouver le désir de rejoindre une communauté, elle fait tout son possible pour que cette démarche soit fructueuse. Ainsi elle met en relation et sert d’intermédiaire entre l’utilisateur de Théovie et le pasteur le plus proche de chez lui. De même avec les détenus : elle utilise le réseau des aumôniers pour mieux diffuser les documents dans les prisons.
Et quand on demande à Katharina comment l’animatrice qui ressource se ressource elle-même, elle a cette réponse : « Mon jardin secret est mon lieu de ressourcement. Je peux en partager les fruits, mais pas le jardin. »
Elle a en fait quatre lieux de ressourcement : son lieu de vie et ses animaux pour un ressourcement personnel ; un ressourcement spirituel avec ses différents collègues animateurs bibliques en région, un peu comme une pastorale ; les rencontres dans les paroisses lors de ses déplacements où elle voit le fruit du travail de Théovie ; et pour finir un réseau d’amis loin de l’Église.
Il ne vous reste plus qu’une chose à faire, si ce n’est déjà fait : partez à la découverte de Théovie pour vous nourrir, rencontrer et finalement grandir dans la foi.