La très grande exclusion parce que se multiplient les cas de personnes qui n’accèdent plus aux dispositifs mis en place pour eux. Les « disparus » de la protection sociale ne pointent plus dans les services sociaux, ne viennent plus chercher un abri pour la nuit, ne se soignent plus… Les écrans radar de notre système social, pourtant si envié hors nos frontières, ne repèrent plus les naufragés de la vie. Pis encore, notre système les évitent, comme les déboutés du droit d’asile, dont personne ne veut.
La très grande exclusion parce que le simple mot d’exclusion a perdu une partie de son sens. Dans une société riche et repue, doutant de son bonheur, la mécanique de l’exclusion ou le sentiment d’exclusion touchent de plus en plus de personnes : les femmes, les jeunes sans diplôme, les chômeurs, les personnes âgées, les paysans et les travailleurs pauvres, les interdits de crédit… Les exclus de jadis, les sans toit, les pauvres et les reclus se sentent un peu plus rejetés.
La très grande exclusion parce que nous ne savons pas réformer. Les politiques publiques, laborieusement, année après année, empilent les dispositifs coûteux sans oser interroger leur efficacité ; leur simple remise en cause est déjà, semble-t-il, un crime de « lèse-société ». Pas d’évaluation, pas d’innovation, pas de reconstruction. […]