Pas de télétravail, au contraire, un surcroît de travail pour faire face à la demande grandissante de nouveaux publics en difficulté et aux frustrations de ceux qui subissent la réduction du nombre de personnes accueillies pour cause de distanciation sanitaire.
À Saint-Nazaire
En décembre. Les bénévoles de l’accueil du solidéj se retrouvent dans la grande salle. Le trio formé par Pierre, le président, et les deux salariées, Claire et Catherine, écoute chacun, fait circuler la parole et apaise les inquiétudes. S’expriment les craintes devant les réactions de certains accueillis parfois agressifs car ne comprenant pas ou n’acceptant pas les nouvelles règles de distanciation sociale. Mais, malgré les risques sanitaires, les bénévoles sont toujours là, engagés pour accueillir les personnes à la rue, leur offrir une collation et la possibilité de prendre une douche. Les problèmes sont abordés un à un et on trouve des solutions. Il y a même de nouveaux bénévoles, venus renforcer l’équipe. Malgré les difficultés, ils se sentent bien à la Frat’, utiles. Tous ressortent requinqués de la réunion : rendez-vous demain matin !
À La Duchère, à Lyon
Christian, le pasteur-directeur du Foyer protestant reprend espoir : un centre social investit partiellement les locaux laissés à moitié vides depuis que l’entreprise d’insertion Mirly, née à la Frat’, a pris son envol pour des locaux plus grands. Depuis qu’on ne peut plus faire d’animation ou de rassemblements, la Frat’ tourne au ralenti. Restent les permanences sociales et d’écrivain public. Les tensions surgies autour du port du masque, ne sont plus d’actualité. Le quartier a dû faire face à des émeutes suite au décès accidentel d’un jeune en scooter. Des voitures ont été incendiées mais la Frat’ est toujours debout, même les plantations en cours n’ont pas été abîmées, explique Christian, une merguez à la bouche à 9 heures du matin : « Je ne pouvais pas refuser, ils ont insisté pour m’en offrir une ! Là je me sens encore plus utile, après tous ces mois d’activité au ralenti, je discute avec les jeunes qui font des barbecues devant la Frat’, on essaye de conserver une ambiance calme et apaisée »
À Rouen
A Rouen, Andrian exprime l’ambiguïté de ces derniers mois : embauché fin 2019, il a pris ses fonctions de directeur plein d’enthousiasme et de projets que le Covid a balayés. Toujours mobilisé, il rêve d’organiser une fête de quartier, de monter des projets avec les partenaires, mais pour l’instant ce n’est pas possible : si seulement on avait une date de reprise on pourrait se projeter. Il a proposé un peu de jardinage, mais il n’y a pas foule. Il y aura plus de monde au moment des récoltes, relativise-t-il. Et puis aussi beaucoup de nouveaux bénévoles sont venus renforcer l’équipe de l’accompagnement scolaire : on a un bénévole pour deux enfants ! Christiane, la trésorière de la Frat’, pour sa part, s’inquiète pour l’AG : présentiel ou distanciel ? L’équipe a consulté tous les décrets : « Difficile, entre ce qui se lit et ce que l’on souhaite faire. » Finalement l’AG se tiendra en présentiel mais à huis clos.
À la Maison Verte
Paris 18e , Laëtitia dort mal : les conséquences financières de la pandémie sont lourdes. On ne peut plus organiser de braderies, d’activités sportives ou de rassemblement, les locations de salles sont en berne, or, elles sont la source principale de recettes ! Et puis, les relations avec les associations utilisatrices des salles lui manquent. Fini les échanges autour d’un café. Elle craint de ne plus en revoir certaines : « Le professeur de tango m’avait suppliée de pouvoir continuer à donner ses cours car sinon, m’avait-il dit, il ne s’en relèverait pas. » Mais ce qui l’occupe le plus c’est le manque de stabilité des équipes bénévoles. Beaucoup de bénévoles de longue date ne viennent plus par crainte du Covid. Deux bénévoles sur sept pour le cours de français. Pour l’accompagnement scolaire, au contraire, « on a plein de nouveaux bénévoles qui s’inscrivent dans la durée » mais elle s’interroge : « Comment cela va se passer quand les anciens bénévoles vont revenir ? »
Au Foyer de Grenelle
Bernard le vice-président se veut optimiste. S’il reconnaît la fatigue des équipes, il est surtout impressionné par l’engagement des bénévoles et salariés qui continuent de répondre présent. Certains le font à distance, par téléphone : pour les cours de français langue étrangère pour adultes (FLE) (cours de français pour adultes) ou pour accompagner, soutenir et écouter celles et ceux qui en ont besoin. Et puis surtout le Foyer de Grenelle est ouvert : les bénévoles et les salariés sont là, malgré les risques. La domiciliation s’est maintenue en présentiel même pendant le premier confinement. Les petits déjeuners se sont maintenus en s’adaptant aux normes sanitaires : l’accueil se fait dans la cour et « avec les normes de distanciation sociale, explique-t-il, on ne peut plus prendre le temps de s’asseoir à côté des personnes pour discuter ». Pour d’autres activités, comme l’atelier informatique, il a fallu réduire fortement le nombre de participants, or il y a énormément de demandes et la précarité numérique est un sujet prioritaire. Et puis, il n’y a plus de grands moments festifs, conviviaux et fédérateurs. « Nos activités sont un prétexte à la rencontre de l’autre et il est temps qu’on puisse toutes et tous se retrouver ! »