D’abord le Déluge. L’histoire biblique de la Création est connue. Adam et Ève, puis tout de suite après la violence entre les cultivateurs, Caïn, et les bergers, Abel. La violence qui se déchaîne : « L’Éternel vit que la méchanceté de l’homme était grande sur la terre, et que chaque jour son cœur ne concevait que des pensées mauvaises. L’Éternel regretta d’avoir fait l’homme sur la terre, […] l’Éternel dit « j’effacerai l’homme que j’ai créé »… » (Genèse 6,5-7) Le Déluge fut. Noé et sa famille se réfugièrent sur l’arche avec deux animaux de chaque espèce vivante pour qu’ils survivent avec lui, et « Tout ce qui était animé d’un souffle de vie et qui était sur la terre mourut. » L’histoire est connue. Elle se termine par la colombe au rameau d’olivier et l’arc-en-ciel. De la colombe au rameau d’olivier, la Bible et Picasso ont fait un symbole universel de paix. L’arc-en-ciel rend heureux l’homme… Après la pluie le beau temps.

« Plus jamais… », dit Dieu

« Je place mon arc dans la nuée [dit Dieu], il sera un signe d’alliance entre moi et la terre. […] et je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous […], les eaux ne se transformeront plus en déluge pour détruire toute chair. » (Genèse 9,13-15) La « morale de l’histoire » est simple, d’une simplicité toute évangélique, à la portée de chacune : le déluge qui détruit toute vie ne sera plus jamais décision de Dieu…

Depuis le Déluge, Dieu n’est plus derrière les malheurs du monde. Les hommes ne doivent plus le croire. Évident, aujourd’hui, dans la société sécularisée occidentale, mais une nouveauté absolue dans le monde religieux au sein duquel circulait le récit biblique finalisé du Déluge (500 ans avant Jésus Christ). Nouveauté qui, au fil des siècles, a participé au développement de l’agriculture, de l’élevage, de l’habitat, des transports… Et au final participe après Copernic (XVIe), Galilée (XVIIe), et le siècle des Lumières (XVIIIe), au développement de la recherche médicale et scientifique, et la sécularisation. Longue histoire millénaire dont nous sommes les héritiers aujourd’hui, à l’heure de l’épidémie du coronavirus.

Se souvenir du signe de l’arc-en-ciel

Chaque fois que nous contemplons un arc-en-ciel, nous devrions nous souvenir nous aussi, comme Dieu, de cette alliance passée entre Lui et nous. Soigner plutôt que souffrir, combattre plutôt que subir… Telle est devenue la place de l’homme dans la Création après le Déluge. Contre le mal et les malheurs…

Pour méditer

C’est la faute à qui ?

« Le malheur n’est la punition de rien, […] il est juste absurde et bête à pleurer. » (Olivier Abel, philosophe). La gloire développe la jalousie parmi les hommes, et le malheur développe le ressentiment.

Puisque Dieu, depuis le Déluge, n’est plus en cause dans nos malheurs, qui va porter le chapeau ? Comment éviter le virus du bouc émissaire ?

L’Évangile propose une voie, adopter le point de vue des victimes, celui de l’homme de la Croix. Mais la porte est étroite… Aujourd’hui, trois mille années plus tard, sans doute évoquerions-nous plus facilement un brutal anéantissement nucléaire ou l’inexorable réchauffement climatique… Mais la question resterait : quelle alliance pour que la vie humaine, bénie de Dieu, continue ?