Comment définiriez-vous la justice de façon générale et en rapport avec les situations que traversent ceux qui vivent dans la pauvreté en particulier ?

De manière générale, la justice c’est le fait de répondre aux exigences divines. En parlant d’exigences divines, j’indique une référence à une norme qui a une source transcendante. Elle est posée par Dieu mais il ne s’agit pas de quelque chose d’arbitraire : parce que Dieu est bon, ses exigences aussi sont bonnes en elles-mêmes et elles sont également bonnes pour les humains. Elles vont se décliner de différentes manières : pour un chrétien, par exemple, il ne s’agira pas de suivre la loi à la façon d’un Israélite dans l’Ancien Testament. C’est pourquoi j’ai évité de parler de « loi » en définissant la justice. Les autorités humaines auront aussi un rôle à jouer dans la concrétisation de la justice mais elles ne seront jamais la référence première.

Concernant le lien entre justice et pauvreté, on peut rappeler ce que souligne Tim Keller lorsqu’il dit que la justice est ce que je dois aux êtres humains qui sont comme moi image de Dieu. Mais il faut comprendre que la norme posée par Dieu vient en premier et qu’ensuite elle me donne des devoirs envers mes frères et sœurs en humanité.

Il s’agit donc, face à celui qui vit dans la pauvreté, de respecter l’image de Dieu en lui ?

Oui, mais cela va plus loin ! Il y a dans l’éthique chrétienne une exigence de solidarité et de générosité. Reconnaissons que l’articulation entre justice et générosité n’est pas facile à penser mais il faut les relier pour affirmer que cette solidarité matérielle envers les personnes en situation de pauvreté ne dépend pas seulement de notre bon vouloir.

Ce n’est pas quelque chose que l’on ferait « en plus » : auquel cas s’en abstenir ne ferait pas de nous des personnes injustes mais « seulement » des gens pas vraiment généreux. Si l’on dit que cela relève de la justice, cela implique que cette générosité est exigée.

Et pourtant… il ne faudrait pas oublier qu’il s’agit bien de générosité ! Cela nous permet de nous rappeler que ce qui est exigé n’est pas si précis que cela. Il est significatif par exemple que le Nouveau Testament n’exige pas de […]