Parfois, nous fonçons tête baissée puis nous retrouvons confrontés aux doutes et aux craintes qui peuvent nous faire sombrer. Il y a là une tension entre l’élan de foi et la menace de la tempête. Nous pouvons nous inspirer d’une scène des Évangiles où Pierre, après avoir marché sur l’eau vers Jésus, doit faire face à ses peurs et à la réalité de sa fragilité humaine.

De l’audace à la menace

L’histoire de Pierre marchant sur les eaux vers Jésus, relatée dans l’Évangile de Matthieu, est emblématique de ce phénomène. Dans un premier temps, Pierre fait preuve d’une grande audace en répondant à l’appel de Jésus. Il quitte la sécurité de la barque, cette zone familière, pour s’aventurer sur les eaux agitées. Ce geste représente un acte de foi, mais aussi une prise de risque. Pierre, comme nous, ose défier les éléments, oubliant parfois le contexte dans lequel il se trouve, oubliant peut-être même la nature de l’équipage avec lequel il a embarqué pour ce voyage.

Mais à mesure qu’il s’éloigne de la barque, l’apôtre perçoit la menace de la tempête. La mer houleuse, la force des vagues et l’ampleur du vent éveillent en lui la peur. Il doute de ses capacités, et ce doute est amplifié par son isolement. L’adrénaline du début de l’aventure cède la place à la terreur, et le sentiment de faiblesse envahit Pierre. Cette crainte de ne pas avoir les ressources pour affronter seul les éléments est, à bien des égards, une expérience universelle.

Un second départ sous le signe du renouveau

Au moment où Pierre commence à sombrer, il n’abandonne cependant pas. Il pourrait se laisser terrasser par sa frayeur, se retrancher dans la honte ou la frustration de ne pas avoir réussi. Au contraire, Pierre tend une main vers Jésus qui s’en empare pour le sauver. Dans ce moment de grande vulnérabilité, Jésus n’abandonne pas Pierre.

Ce retour vers la barque n’est pas un échec. Au contraire, il symbolise une réintégration dans une communauté. Pierre n’est plus seul, mais il retrouve ses compagnons, ceux qui ont traversé avec lui cette épreuve. Il revient à un point de départ qui est aussi un lieu de renouveau. En revenant dans la barque, Pierre accepte ses limites humaines. Il reconnaît que son engagement, aussi noble soit-il, doit être assumé avec l’aide de Dieu et de ceux qui partagent le même but.

Au nom d’un accueil inconditionnel, nous faisons souvent preuve d’audace. Mais quand l’autre nous confronte à nos peurs et nos limites, nous déstabilise, il devient menace. Je crois que notre ressenti peut faillir et que l’autre, en apparence menaçant, renferme bien des promesses. L’histoire de Pierre nous invite à réfléchir à la manière dont nous affrontons nos défis. Accueillir l’autre, c’est oser prendre un risque, quitter notre zone de confort et progresser.

Mais notre audace, même si elle est fondée sur la foi, ne nous épargne ni les difficultés ni les incompréhensions. Lorsqu’elles surgissent, nous pouvons céder à la peur et renoncer. Ou choisir de faire la part des choses entre notre ressenti, nos émotions, et la réalité. La tempête n’est jamais aussi menaçante que lorsque nous l’affrontons seuls. À l’image de Pierre, rappelons-nous que la main tendue de Dieu et le soutien de notre entourage sont essentiels pour relever nos plus grands défis.