Selon la tradition rabbinique, le premier commandement est celui qui dit : « C’est moi, le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir de la maison de servitude. » Le deuxième commandement rassemble ceux que nous considérons comme les deux premiers : « Tu n’auras pas d’autres dieux, tu ne te feras pas d’idole. »
L’étonnant de cette lecture est que la première parole n’est pas un commandement, mais une affirmation ! Le mot déca-logue veut dire, étymologiquement, dix paroles et non dix commandements.
Cette lecture nous conduit à entendre chaque parole comme étant précédée par la libération. Les dix paroles se présentent comme une réalité spirituelle à deux faces. Une face qui proclame la libération de Dieu et une face qui évoque les ordonnances que les hommes doivent suivre pour vivre la libération. Les sages disent qu’entre la libération et la prescription il y a le même rapport qu’entre l’océan et la vague, le soleil et la lumière, l’instrument et la musique.
Lorsque Dieu ouvre un chemin de liberté à son peuple, il lui donne en même temps une loi pour qu’il puisse vivre de cette liberté. Le Premier Testament savait qu’une libération qui n’est pas accompagnée d’un solide code éthique peut dégénérer dans une tyrannie pire que la première.
Après la première parole, les trois suivantes posent la juste relation à Dieu : « Tu ne te feras pas d’idole… Tu ne prendras pas le nom du Seigneur ton Dieu en vain… Souviens-toi du jour du sabbat. » Ces paroles sont les indicateurs de la liberté spirituelle.
La cinquième est un appel à la mémoire et à la reconnaissance : « Tu honoreras ton père et ta mère. »
Les quatre suivantes sont les conditions d’une vie en société possible : « Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne commettras pas d’adultère. Tu ne commettras pas de vol. Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. »
La dernière est un appel à ne pas convoiter ce qui appartient à notre prochain, ce qui est le stade ultime de la liberté.
La grammaire des commandements
La plupart des paroles ne sont pas conjuguées à l’impératif, mais à un temps qui est assimilé au futur. Les dix paroles ne disent pas : « N’aies pas d’autres Dieux, ne te fais pas d’idole, ne tues pas et ne convoite pas », mais : « Tu ne te feras pas d’idole, tu ne tueras pas, tu ne convoiteras pas ».
Derrière cette conjugaison, se trouve une promesse : « je te le promets, dit Dieu, il te sera possible de… » Il ne nous enferme pas dans une règle, il promet un chemin de liberté.