Par Elisabeth Brinkman, pasteure à Brive

Dès le début du Premier Testament, ça commence très mal avec l’histoire de Caïn et Abel. Puis, cela continue avec Jacob et Ésaü, Rachel et Léa, Joseph et ses frères, et les fils de David qui se battent pour la succession. Le Second Testament n’est pas en reste avec la rivalité entre Jacques et Jean, entre Marthe et Marie et ne parlons pas du frère aîné du fils prodigue.

Les récits bibliques sur les relations entre enfants d’une même fratrie n’ont rien de romans à l’eau de rose. On y trouve l’envie et la jalousie, la tricherie, la haine et la rivalité ; la vraie vie, quoi. On tue, on vole, on viole même dans les familles.

Et puis, que dire de ces chrétiens qui s’appellent « frères et sœurs » entre eux mais qui se disputent à longueur de textes ? Pourquoi les relations fraternelles sont-elles souvent si compliquées ?

Vocation

Le frère (ou la sœur) m’est donné : ce n’est pas moi qui choisis, ce sont mes parents. Il me faut accepter ce fait accompli. Du coup, ce n’est pas une relation choisie, mais qui est à construire. Caïn pose une question essentielle quand il lance à Dieu : « Suis-je le gardien de mon frère ? ».

Caïn refuse de considérer Abel comme le frère qu’il est et l’ami qu’il pourrait être, mais le voit comme un concurrent qu’il faut éliminer. Mais la question qu’il pose à Dieu dit bien en creux le contraire : le frère c’est celui dont on se préoccupe, celui dont on prend soin. Toutes ces fra[1]tries contrariées nous montrent ce qui est demandé depuis le début et ce qu’il est si difficile de faire : que nous adoptions ce frère, que nous développions un lien d’amitié et d’amour fraternel avec lui. La fraternité dépasse, et de loin, le lien du sang.

L’amour

Dès le Premier Testament nous dépassons ce lien biologique puisqu’Israël déjà est défini comme une communauté de frères et sœurs où chacun a une place reconnue. À la fin de ce qu’on appelle le code de sainteté en Lévitique 19, il est dit (v. 18) : « Chacun de vous aimera son prochain comme lui-même. Je suis le Seigneur. »

Ce thème du prochain à aimer comme soi-même sera un thème central de l’enseignement de Jésus et de la vie chrétienne. Christ lui-même sera le frère de tous, ce qui fait dire à Paul (Romains 8.29) : « Dieu les a choisis d’avance ; il a aussi décidé d’avance de les rendre semblables à son Fils, afin que celui-ci soit l’aîné d’un grand nombre de frères et de sœurs. »

Une espérance

La fraternité nous est donc offerte comme un cadeau. « Va trouver mes frères », dit le Christ ressuscité à Marie de Magdala, le matin de la résurrection (Jean 20.17). Ce n’est pas une chose facile, Matthieu en sait quelque chose puisqu’il met dans la bouche de Jésus ces paroles (Matthieu 5.43-45) : « Vous avez entendu qu’il a été dit : “Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.” Eh bien, moi je vous dis : “Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent.” Ainsi vous deviendrez les enfants de votre Père qui est dans les cieux. »

La Bible nous montre qu’il est possible de devenir frères et sœurs grâce à ce cheminement dans la foi. La fraternité est bien de l’ordre de l’espérance.