Il me semble que le discours des Evangiles oscille entre deux manières contradictoires de présenter la Passion du Christ.
• D’une part les Evangiles considèrent que Jésus a voulu mourir sur la Croix à Jérusalem. C’était son choix et s’il en est ainsi, on ne voit pas en quoi la trahison de Judas aurait été nécessaire. Jésus, du moins tel qu’il est présenté par les Evangiles, considérait que sa mission était d’être le Serviteur Souffrant décrit dans le livre d’Isaïe, en particulier Is. 53 (Mat. 26,53; Jn 12,27; Jn 19,11). Ce Serviteur consent à être une victime expiatoire portant les péchés du monde.
Ainsi Jésus considérait que sa vocation et sa mission étaient de « donner sa vie ». Il l’a dit clairement : « Personne ne m’enlève ma vie, mais je m’en dessaisis de moi-même… Tel est le commandement que j’ai reçu de mon Père » (Jn 10,18) « Le bon berger donne sa vie pour ses brebis » (Jean 10,11) « Je donne ma vie pour mes brebis » (Jn 10,15) « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie » (Jn 15,13). « Le Fils de l’Homme est venu pour donner sa vie en rançon pour beaucoup » (Marc 10,45, cf. aussi Mat. 20,28; Mat. 26,26-28 etc.).
Si l’on considère que Jésus ne s’est pas sacrifié volontairement, il devient un condamné à mort comme bien d’autres, et c’est toute la foi chrétienne qui perd son assise. La mort de Jésus perd toute son aura tragique et sa signification théologique.
• Mais d’autre part, les Evangiles disent que si Jésus a été conduit à la Croix, c’est parce que Judas l’a livré aux autorités juives pour qu’elles le jugent et le condamnent. Avant même les Juifs, c’est Judas qui serait le premier « déicide ». D’ailleurs les Evangiles présentent Judas comme habité par Satan (Luc 22,3; Jn 13,27).
Ainsi on peut se poser la question : Comment peut-on dire à la fois que Jésus s’est livré lui-même à la mort et que c’est Judas qui a été le promoteur et l’artisan de cette mise à mort ?
J’ajouterai quelques remarques :
- Dans les premiers textes du Nouveau Testament, à savoir les Epîtres de Paul, qui sont bien antérieures aux Evangiles, il n’est jamais question de Judas et encore moins son rôle. Paul ne s’intéresse pas au « parce que » (les causes historiques de la crucifixion de Jésus), mais seulement au « pour que » (la fonction rédemptrice de la mort et de la résurrection du Christ).
- En revanche, les Evangélistes, et à leur suite les chrétiens, n’ont pu se résoudre à voir la crucifixion de Jésus uniquement comme un bien salutaire voulu par Dieu. Elle était aussi, de toute évidence, une ignominie, et, à ce titre, elle devait être imputée à un suppôt de Satan. De fait, l’accomplissement du bien inclut toujours une forme de “part maudite“. Judas est cette part maudite et il devra l’expier par son suicide.
- Le livre des Actes évoque Judas, mais, curieusement, on pourrait presque dire qu’il en fait l’éloge (Actes 1,16). C’est, dit-il, parce que Judas a été « le guide de ceux qui ont arrêté Jésus » qu’a pu s’accomplir ce qui avait été annoncé par les Ecritures. On ne saurait mieux souligner l’ambiguïté du rôle de Judas.
- A partir du moment où l’Eglise chrétienne naissante a voulu se séparer du Judaïsme, elle a de plus en plus insisté sur la responsabilité de Judas et aussi des Juifs, dans la crucifixion de Jésus. C’est pourquoi c’est dans l’Evangile de Jean, le plus tardif, que l’on « charge » le plus Judas et les Juifs, et qu’en revanche on innocente le plus possible Ponce Pilate (Jn 18,11). Et par la suite, cet “anti-Judas-isme“ n’a fait que croître, on ne le sait que trop.
Dans les pages qui suivent, je voudrais donner, après bien d’autres d’ailleurs[1], une présentation (partiale, j’en conviens) du rôle de Judas dans les jours qui ont précédé la crucifixion de Jésus. Je voudrais montrer, en usant d’une fiction (celle d’un écrit de Judas lui-même), que Judas a aidé Jésus à mettre en œuvre son projet : mourir à Jérusalem en s’offrant en sacrifice.
Lettre ouverte de Judas-le-traître à tous ceux qui le condamnent
Après que Judas se fut suicidé, on retrouva cette lettre auprès de son cadavre :
Mesdames et Messieurs les jurés du Tribunal de l’Histoire,
Oui, je le sais, pendant des siècles, peut-être des millénaires, on va faire mon procès. Oui, vous, Messieurs les inquisiteurs de tout poil, Messieurs les moralisateurs de toute obédience, Messieurs les disciples de mon Maître Jésus de Nazareth, vous allez faire mon procès, le procès de Judas le traître, le traître par excellence, le prototype du traître. Vous allez dire, écrire et proclamer que Judas a trahi son Maître et Seigneur par un baiser, « le baiser de Judas », de Judas le perfide, Judas le juif, Judas le cupide, Judas à la bourse d’argent, Judas au nez crochu, Judas au teint glauque, Judas à l’oeil torve, Judas vêtu de jaune, couleur des traîtres, Judas le rouquin, couleur des ignobles, bref, de Judas l’instrument de Satan. Oui, je le sais, c’est cette image que l’on retiendra de moi.
Dans quelques heures, je rapporterai les trente deniers que l’on m’a donnés pour me payer ma soi-disant trahison. Puis je me supprimerai. Mais avant, Messieurs les jurés, je veux vous dire ce qu’il s’est réellement passé. Je vais vous dire ce que j’ai réellement fait et pourquoi je l’ai fait.
Vous connaissez l’histoire telle qu’on la raconte ; on la ressasse suffisamment souvent. Je serais allé voir les grands prêtres du Temple pour leur livrer Jésus moyennant trente deniers afin qu’ils puissent le faire arrêter et crucifier. Lors de notre dernier repas, peu avant sa crucifixion, Jésus aurait montré qu’il était au courant de mon projet. Il m’aurait clairement désigné comme celui qui allait le trahir. Ensuite, je serais venu à la tête de la cohorte armée qui devait l’arrêter et, pour le désigner à la troupe, je lui aurais donné un baiser, ce que l’on voit comme le comble de l’hypocrisie et de l’ignominie. Puis après son arrestation, Jésus se serait laissé conduire au lieu de son supplice, à Golgotha. Ainsi, il aurait été crucifié par ma faute.
Pour expliquer mon comportement, on a prétendu que j’étais cupide et que j’aurais trahi mon Maître pour les trente deniers que l’on m’a versés. Mais en fait, ces trente deniers ne constituaient qu’une somme tout à fait dérisoire et une valeur symbolique[2]. Si j’avais été cupide, j’aurais pu tout simplement partir avec la caisse puisque j’étais le trésorier du groupe des apôtres.
On a dit aussi que je m’étais lié à Jésus parce que je voyais en lui un Messie politique, un chef révolutionnaire qui pouvait délivrer le peuple d’Israël du joug de l’occupation romaine. Et voyant que Jésus se refusait à toute action violente, je me serais détaché de lui, allant jusqu’à le trahir en le livrant à l’ennemi.
Mais en fait, il n’en est rien. Je ne me suis jamais détaché de Jésus, bien au contraire. Il est vrai que comme Pierre et d’autres disciples du Maître, j’étais proche du courant zélote qui appelait à se révolter contre les Romains, alors que Jésus, lui, était non violent. Mais cette divergence n’était pas décisive. J’ai toujours cru que Jésus était le Messie que nous attendions. J’étais sûr que sa mort serait suivie, ainsi qu’il l’annonçait, de sa résurrection et qu’adviendrait le Royaume de Dieu que nous voyions comme une ère nouvelle de justice, de liberté et d’indépendance nationale pour Israël.
Pour être le Messie, il faut savoir mourir à temps
En fait, je vous le dis fermement. Si de fait, j’ai permis l’arrestation de Jésus en le livrant à ceux qui l’ont crucifié, c’était en plein accord avec lui et parce qu’il le souhaitait. Je ne l’ai pas trahi, loin de là. Je lui ai permis d’accomplir ce qu’il pensait être sa vocation et son devoir sacré.
Certes, je comprends que vous soyez étonnés, et même décontenancés, Mesdames et Messieurs les jurés. Mais je vais reprendre l’histoire en rétablissant les faits.
Mon Maître voulait être mis à mort et il tenait à ce que cette mort soit comprise comme un sacrifice volontaire. C’est pour cela qu’il souhaitait être mis à mort à Jérusalem le jour de la Pâque juive[3], c’est-à-dire le jour où chaque famille juive immolait un agneau en signe du renouvellement de l’alliance de Dieu avec son peuple. Jésus voulait, à l’image de ces agneaux, être vu comme l’Agneau qui expiait par son sacrifice les péchés du monde[4]. Il fallait donc que son martyre au jour fixé[5].
Pour cela, une dizaine de jours auparavant, il se décida à monter vers Jérusalem [6]pour y être arrêté et mis à mort à la date prévue. Cinq jours avant la date de la Pâque, il arriva à Jérusalem et tout le monde lui fit fête en agitant des rameaux, ou plus exactement des palmes. Personne ne songeait à l’arrêter. Cela troubla ses plans. Pour qu’on s’empare de lui, il imagina alors un premier stratagème. Lui qui était un pacifiste convaincu, il demande à ses disciples d’acheter chacun une épée[7] afin qu’on puisse croire qu’il était venu fomenter une révolte. Tout ceci pour être arrêté à temps. Mais rien ne se passa. Et pourtant le temps pressait.
Il fallait trouver autre chose et que quelqu’un aille le dénoncer comme un zélote, comme un de ces sicaires qui voulaient s’en prendre au pouvoir romain et aux grands prêtres du Temple qui collaboraient avec lui. Et j’ai pensé que pour hâter son arrestation, il fallait que ce soit moi qui dénonce Jésus en faisant semblant de le trahir. D’ailleurs Jésus, en nous incitant à nous armer, n’avait-il pas été le premier à vouloir se faire passer pour un agitateur ? Et pour que ma « dénonciation » soit crédible, il fallait que je me fasse payer, fut-ce par une somme symbolique[8].
La suite a montré que j’avais eu raison. Jésus était pressé d’en finir. Il voulait absolument être arrêté à temps. Le jour du repas traditionnel qui précède la Pâque (on l’appelle le repas de Seder)[9], celui où il partagea avec nous le pain et le vin, il s’adressa à ses disciples et leur dit « Je vous le dis en vérité, l’un de vous va me livrer » [10]. C’était une demande, on pourrait dire un ordre. Il fallait que l’un des disciples se dévoue pour aller le « livrer » aux autorités. Mais tous craignaient d’être mandatés pour accomplir cette tâche. C’est alors que Jésus me désigna ouvertement aux yeux de tous. Et il le fit par un geste dont vous n’avez jamais compris le sens. C’était un geste d’affection, de tendresse et de sollicitude. De fait, mon Maître avait tout à fait conscience que ce qu’il me demandait serait pour moi extrêmement pénible. Après avoir dit « Celui qui me livrera, c’est celui qui mettra avec moi la main dans le plat » [11], « il prit la bouchée qu’il avait trempée dans le plat et me la donna »[12]. C’est le geste du père qui, lors du repas de la Pâque, donne la galette de pain azime à son fils[13]. Puis, après m’avoir donné cette bouchée, Jésus ajouta « Ce que tu as à faire, fais-le rapidement »[14] . En effet, le temps pressait. C’est pourquoi je sortis rapidement[15].
Oui, Messieurs les jurés, vous qui vous devez d’avoir réponse à tout, comment expliquez-vous que Jésus ait voulu me démasquer et me désigner comme un “traître“ alors qu’au même moment il me faisait ce geste d’amitié et même, je pèse mes mots, de communion ? Et comment expliquez-vous que moi-même, j’ai pu accepter cette dénonciation infamante sans chercher à me disculper, fut-ce par un mensonge[16]? Et comment expliquez-vous que j’ai pu immédiatement quitter la table à la demande de Jésus et partir sans qu’on m’en empêche ? Tout cela ne tient pas debout !
Et laissez-moi ajouter que si Jésus m’a désigné, moi, pour être sacrifié à temps, c’était parce que j’étais probablement le seul à pouvoir comprendre et accepter la raison pour laquelle il voulait mourir en martyr[17]. Comme lui, je pensais que cela permettrait l’avènement de ce qu’il appelait le Royaume de Dieu.
En fait, je n’ai pas trahi Jésus, j’ai accepté de passer pour un traître.
La mort de Jésus, un « suicide assisté »
La suite, vous la connaissez. J’ai continué à jouer mon rôle de traître. On dit que je suis allé avec la cohorte qui devait arrêter Jésus afin qu’on le reconnaisse. Quelle bêtise ! Depuis que Jésus avait triomphalement traversé Jérusalem le jour de la fête des palmes, il était tout à fait connu des autorités ; on n’avait besoin de personne pour le retrouver. De plus, il enseignait quotidiennement dans les synagogues et sur le parvis du Temple et il ne faisait rien en secret[18].
Si je me suis mis en tête de la cohorte qui venait l’arrêter au domaine de Gethsemani, c’était uniquement pour que les choses aillent plus vite, comme le Maître me l’avait explicitement demandé. Et si je lui ai donné un baiser, ce n’était bien sûr pas pour le désigner, mais pour montrer que nous étions amis et de connivence. D’ailleurs, au moment où je l’ai embrassé, je l’ai appelé « Rabbi », un titre de respect et même d’obéissance. Et Jésus m’a répondu en m’appelant son « ami » et en m’encourageant par ces mots « Fais ta besogne »[19]. De fait, je ne faisais rien d’autre que la besogne qu’il m’avait demandé d’accomplir. D’ailleurs Jésus a refusé que l’on oppose quelque résistance que ce soit à la soldatesque.
Je suppose qu’il était même soulagé de ne plus avoir à tergiverser par rapport à ce qu’il devait faire. En effet, il avait sans doute un peu peur de ce martyre auquel il avait décidé de se soumettre. Selon ce que certains disciples ont dit, il avait même supplié le Père d’écarter de ses lèvres la coupe du supplice auquel il devait consentir[20]. En fait, maintenant qu’il était arrêté, son destin était inéluctable, et sans doute m’en était-il reconnaissant. Il avait décidé de mourir et je l’avais aidé à mettre en œuvre sa volonté. Ce que l’on pourrait appeler son suicide, en tout cas sa mort volontaire, avait été « assisté » grâce à mon intervention. J’avais « trahi » Jésus pour qu’il ne se trahisse pas et aille jusqu’au bout de sa vocation.
Ceci est mon corps donné pour Jésus
J’en viens maintenant, Mesdames et Messieurs les jurés, à mes derniers mots. Oui, je vous écris ce testament avant de me supprimer. Et je vais vous dire pourquoi.
Après son arrestation, Jésus a été crucifié. C’était avant-hier. Comme beaucoup de mes contemporains, j’étais persuadé qu’à la mort du Messie, le Royaume de Dieu tant attendu adviendrait sans plus tarder[21]. Jésus lui-même le croyait. Il avait dit à plusieurs reprises qu’il était sûr qu’il ressusciterait en tant que Seigneur et Roi d’un royaume de justice. Or, depuis sa mort, il y a deux jours déjà, rien ne s’est passé. Pas de résurrection, pas de Royaume. Je m’étais trompé[22], ou plutôt j’avais été trompé. Si j’avais accepté de livrer le Maître à ses bourreaux, c’est parce que j’étais sûr que sa mort serait la pierre angulaire d’une ère nouvelle, celle de la délivrance d’Israël. Je croyais en Jésus, je croyais qu’il était le Messie peut-être même plus qu’il ne le croyait lui-même.
Mais de fait, j’ai livré Jésus en vain, pour rien. Je ne me le pardonne pas. Je vais aller rapporter les trente deniers aux chefs des prêtres et aux anciens, et je leur dirai : j’ai péché en livrant un sang innocent[23]. Et j’irai ensuite me tuer[24]. On retrouvera mon corps ouvert par le milieu, toutes entrailles répandues[25].
Voilà, je vous ai tout dit. Peut-être que plus tard, certains voudront me réhabiliter. Mais je n’en sais rien. Il faut toujours un bouc émissaire pour tenter d’expliquer un drame incompréhensible, et en particulier la mort d’un innocent. J’aurai joué jusqu’au bout mon rôle de traître, et il me faudra sans doute l’assumer des siècles durant. Mais, de toute façon, quant à moi, je garderai jusqu’à mon dernier souffle le goût de la bouchée que Jésus m’a donnée et aussi le son de sa voix quand il m’a appelé son ami. Je ne suis plus très sûr que l’on puisse dire que Jésus a donné sa vie pour nous et pour notre salut. En revanche, ce dont je suis certain, c’est que, moi, pour lui, j’ai donné ma vie, mon honneur et peut-être mon salut.
[1] cf. J.L. Borgès Trois versions de Judas; Shmuel Hasch, L’Evangile selon Schmuel, et plus récemment Amos Oz, Jésus et Judas, Grasset 2021
[2] Dans la tradition juive, c’est la somme dérisoire pour laquelle les impies sont prêts à renier Dieu, cf. Zacharie 11, 12-13. Ces trente deniers sont une piètre somme si on les compare aux trois cents deniers que valait le parfum répandu sur les pieds de Jésus par Marie de Magdala.
[3] Plus précisément Jésus souhaitait sans doute mourir le jour de la Préparation de la Pâque. Les agneaux étaient immolés ce jour-là, mais on les mangeait après le coucher du soleil, c’est-à-dire en fait le lendemain, le jour de la Pâque, puisque selon le comput juif, chaque jour commençait au coucher du soleil.
[4] Jean 1,29 et 37; Jean 19,14.37; 1 Cor. 5,7
[5] La question de la date précise de la crucifixion de Jésus est débattue. L’Evangile de Jean la fixe très vraisemblablement au jour de la Pâque juive.
[6] Luc 18,31
[7] Luc 22,36
[8] Les Evangiles placent la tractation de Judas avec les autorités avant le repas de la Pâque, c’est-à-dire avant que Jésus ne le mandate explicitement. Cela semble contredire notre thèse. Mais Judas n’a mis en œuvre ce qui avait été convenu avec les grands prêtres qu’après le repas de la Pâque, c’est-à-dire après avoir été mandaté. On peut ainsi comprendre que Jésus ait pu dire lors de ce repas : « L’un de vous me livrera » (au futur).
[9] Au cours de ce repas, Jésus explicita le sens de sa mort sacrificielle par ces mots: « Ceci est mon corps donné pour vous » « Ceci est mon sang versé pour la multitude »
[10] Matthieu 26,21. Il faut en effet, comme le fait la TOB, traduire le verbe du texte grec par “ livrer » et non pas “trahir“.
[11] Matthieu 26,23. C’est ce que Matthieu se contente de dire. Jean 13,26-27 rapporte le geste de Jésus de manière légèrement différente.
[12] Jean 13, 26-27
[13] Plus exactement, lors du repas de Seder, on devait tremper une bouchée de produits de la terre et d’herbes amères dans les ingrédients du plat commun. C’est cette « bouchée » que Jésus donne à Judas. cf; Schalom Ben Chorin, Mon frère Jésus, Seuil 1983, p. 159.
[14] Idem
[15] Jean 13,30
[16] De fait, si comme on le pense en général, Jésus avait voulu démasquer Judas en le désignant publiquement comme un traître, il n’aurait pas usé d’un geste aussi déroutant et absolument contre indiqué. Il aurait pu simplement dire: c’est Judas qui me trahira. Si les quatre Evangiles ont relaté le geste incompréhensible de Jésus, c’est vraisemblablement parce qu’il l’a effectivement accompli et qu’ils ne pouvaient le passer sous silence quand bien même il dérangeait profondément leur logique et leur manière de présenter Judas comme un traître. De fait, c’est ce qui est le plus difficile à comprendre et à admettre dans le texte biblique qui a le plus de chances d’avoir une réalité historique. Je fais ici référence au principe exégétique de la lectio difficilior qui considère que, dans le texte biblique, il faut reconnaître comme véridique et historiquement avéré ce qui présente des “difficultés“ par rapport à la ligne générale de l’idéologie et du récit des auteurs du texte.
[17] Dans le passé, lors des révoltes du peuple d’Israël contre Rome, ceux qui mourraient pour leur foi étaient honorés comme des martyrs et on pensait qu’ils ressusciteraient cf. 2 Maccabées 7,9 et 14,23
[18] Jean 18,20
[19] Matthieu 26,50
[20] Luc 22,42
[21] Du temps de Jésus, la plupart des juifs pensaient, en conformité avec ce qui avait été annoncé par les Ecritures (Ps. 72,3 et 7, Isaïe 11,6-8, Ez. 34,23…) que la venue du Royaume serait concomitante à celle du Messie, ou du moins, pour certains, à celle de sa mort sacrificielle ( cf. Les Chants du Serviteur dans Isaïe).
[22] L’annonce que Jésus n’ait ressuscité que le troisième jour après sa mort n’a été prêchée que plus tardivement. A l’époque de Jésus, on ignorait ce délai. Cf. les pèlerins d’Emmaüs qui, comme Judas, sont désemparés et déçus après la crucifixion de Jésus (Luc 24,21), cf. aussi Luc 18,34.
[23] Matthieu 27,3
[24] Actes 1, 15-20. En fait Matthieu et Actes rapportent le suicide de Judas de deux manières différentes.
[25] Actes 1,18