Valérie Nicolet est Professeure de Nouveau Testament à l’Institut protestant de théologie (IPT) à Paris.

Dans le premier récit de la création, Dieu crée l’homme et la femme pour qu’ils soient féconds, remplissent la terre et la dominent. Dans le deuxième récit de la création, le Seigneur crée d’abord l’homme, puis lui fait « une aide » (Genèse 2,18). Dans ce deuxième récit, on sent un attachement plus fort de l’homme envers la femme, puisque l’homme dit : « Cette fois c’est l’os de mes os, la chair de ma chair. Celle-ci, on l’appellera ’femme’, car c’est de l’homme qu’elle a été prise. » (Genèse 2,23). Le narrateur ajoute à cette création du couple le commentaire suivant : « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair. » (Genèse 2,24).

Dans le Nouveau Testament, ce commentaire est au centre d’une controverse entre Jésus et les Pharisiens, rapportée dans les Évangiles de Marc et de Matthieu. L’évangéliste Marc indique que Jésus remet en cause le droit au divorce. Cet acte juridique est pourtant établi par la tradition juive, notamment dans le livre du Deutéronome (24,1-4), un texte auquel les Pharisiens font d’ailleurs référence. L’auteur de l’Evangile de Marc fait dire à Jésus : « Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni ! ».

Le cœur vaut mieux que le droit

On pourrait en déduire que Jésus est opposé par principe au divorce. Pourtant, dans ce contexte, selon la façon dont Marc traite le récit, Jésus ne s’oppose pas au divorce de façon absolue, mais cherche à déplacer la question sur un autre terrain. Au début du passage, Marc mentionne que les Pharisiens tendent un piège à Jésus. Leur question, « est-il permis à un homme de répudier sa femme ? » (Marc 10,2), a pour but de forcer Jésus à choisir une position dans ce débat.

Jésus répond en soulignant leur dureté de cœur. Comme le suggère Barbara Green, cette réponse ne concerne peut-être pas tant le divorce, mais la condition de ceux et celles qui ont le cœur endurci. A l’époque de Jésus, le divorce est, de façon générale, admis dans le judaïsme. Le débat porte sur les causes admissibles du divorce.

Jésus refuse de prendre position, mais déplace la question. En citant la Genèse, il abandonne le cadre légal et s’intéresse à la façon d’accueillir et d’aimer l’autre. Il est très difficile de déterminer la position de Jésus quant à l’acceptabilité du divorce, mais il est clair que Jésus, selon l’Evangile de Marc, sort des débats légaux autour de la légitimité du divorce, pour insister sur la responsabilité des êtres humains les uns envers les autres.

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Edition Genève du mois de Juin 2017