Les protestants affirment que le Christ a eu des frères et sœurs, mais les Églises catholique et orientales soutiennent qu’il est enfant unique et que Marie est restée vierge.

Dans les premiers temps du christianisme, Marie ne fait l’objet d’aucun culte particulier. Il faut attendre le IIIe siècle pour qu’elle soit placée sur un piédestal et nommée « Mère de Dieu ». Il manque au christianisme une figure féminine forte, à l’instar des déesses païennes ; Marie comble ce vide et permet une christianisation de territoires attachés à pareilles représentations.

Frères et sœurs ou cousins, cousines ?

Si Marie est demeurée vierge, que faire des textes du Nouveau Testament qui citent les frères et sœurs du Christ ? Les tenants de la thèse de l’enfant unique en font de simples cousins. Pourtant, il existe deux termes grecs distincts pour désigner le frère de sang (adelphos) et le cousin (anepsios), que ne pouvaient ignorer les personnes qui ont rédigé le Nouveau Testament en grec. Les frères de Jésus sont cités à plusieurs reprises dans la Bible. Lorsque Jésus prêche chez lui, dans la synagogue de Nazareth, l’assistance est étonnée par la puissance de sa parole. Certains disent : « N’est-ce pas le fils du charpentier ? Sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie, et ses frères Jacques, Joseph, Simon et Jude ? Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes chez nous (1) ? »

Si Joseph et Marie sont présentés comme les parents de Jésus dans ce verset, c’est bien que les frères et sœurs mention nés ont les mêmes parents. Notons au passage que les frères sont nommés mais pas les sœurs, dont nous ne connaîtrons jamais le prénom. Dans un autre passage, Jésus enseigne dans une maison bondée. « Arrivent sa mère et ses frères » qui le font appeler. Jésus interroge la foule : « “Qui sont ma mère et mes frères ? ” Et parcourant du regard ceux qui étaient assis en cercle autour de lui, il dit : “Voici ma mère et mes frères. Quiconque fait la volonté de Dieu, voilà mon frère, ma sœur, ma mère (2).” » Là encore, il paraît difficile de soute nir que ceux qui se tiennent avec sa mère sont des cousins.

Une filiation spirituelle

Jésus oppose ici sa famille naturelle à sa famille « recomposée » de ceux qui entretiennent une relation avec Dieu. Les deux passages cités se trouvent dans les Évangiles de Matthieu, Marc et Luc. Jean peut éventuellement laisser planer un doute quant à l’existence d’une fratrie. La mère de Jésus et Jean, « le disciple que Jésus aimait », sont au pied de la croix. Le Christ crucifié dit à sa mère, en parlant de Jean : « “Femme, voici ton fils.” Il dit ensuite au disciple : “Voici ta mère.” Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui (3). » Pourquoi Marie, si elle a d’autres enfants, n’irait-elle pas vivre chez eux ? Étant donné le contexte et la nature de l’Évangile de Jean, il s’agit probablement pour Jésus, à ce moment dramatique, de passer d’une filiation charnelle à une filiation spirituelle. Reconnaissons que la notoriété du fils aîné a éclipsé les autres membres de la famille. Si la tradition a accordé sa revanche à Marie, il n’en va pas de même pour les frères et sœurs, relégués au rang de « cousins de province » par certains, ni de Joseph, héros d’un écrit sans grande notoriété, Histoire de Joseph le charpentier, paru à la fin du vie siècle dans l’Égypte byzantine.

1 Matthieu 13.55-56.

2 Marc 3.31-35.

3 Jean 19.26-27.