Le livre de Job est une déconstruction de nos élaborations théologiques face à la question du mal. L’histoire est la suivante. Job est un homme qui a tout pour être heureux, il a une bonne santé, une belle famille et une grande fortune. Tous les jours, Job ne manque pas de rendre grâce à Dieu.

Le drame arrive lors d’une entrevue entre Dieu et son ennemi le Satan. Alors que Dieu loue la piété de Job, son Adversaire a beau jeu de lui faire remarquer qu’il n’est pas difficile d’être pieux quand on est béni : «  Étends ta main, je te prie, et touche à tout ce qui lui appartient : à coup sûr, il te maudira en face[1]. » Dieu n’a pas d’autres solutions que d’éprouver Job pour tester la gratuité de sa foi. Job va perdre ses enfants, sa fortune et la santé. L’iconographie le dépeint sur son tas de fumier.

Il reste juste à Job trois amis qui ont fait le voyage pour visiter leur ami qui est dans la peine. Les choses se gâtent lorsqu’ils essayent de trouver un sens spirituel au malheur qui frappe Job. Ils tiennent des discours bien pieux pour expliquer à Job qu’il a dû commettre quelques fautes pour être éprouvés à ce point. Job résiste, il ne sait pas ce que fait Dieu, mais il refuse de rentrer dans la logique rétributive de ses amis.

Pendant 35 chapitres Job et ses amis discourent sur Dieu et Dieu se tait. Quand il sort de son silence, il prend Job par la main pour lui proposer une visite de la création. Il lui parle météorologie avec la grêle et la neige, les éclairs et le tonnerre, le vent et la pluie. Il parle zoologie en évoquant la chasse de la lionne, la progéniture des biches, la bêtise de l’autruche et la puissance du cheval. Il parle mythologie avec l’évocation du Béhémoth invincible et du Léviathan indomptable. Ces chapitres sont superbes, mais, à première vue, ils n’ont que très peu de rapport avec le débat qui oppose Job à ses amis. Pourtant, Job y trouve son compte et confesse sa foi retrouvée : Mon oreille avait entendu parler de toi ; maintenant mon œil t’a vu[2].

 

La réponse de Dieu

Dans le dialogue avec ses amis, Job était enfermé dans une compréhension utilitaire de Dieu : Il faut croire et faire le bien afin d’avoir une vie bonne. Face à cet enfermement, la contemplation de la création a révélé un univers qui fait exploser les frontières de l’utile. Comment faire entrer un buffle, une autruche ou un hippopotame dans les catégories de ce qui est utile ou pas ? C’est l’évocation de l’immensité de la création qui a permis à Job de retrouver le sens de la gratuité et de l’émerveillement.

 

[1] Jb 1.11.

[2] Jb 42.5.