Par Katharina Schächl, pasteure, responsable de ThéoVie (formation biblique et théologique à distance de l’EPUdF, www.theovie.org)

Ce passage ouvre beaucoup de pistes. Vous pourriez d’ailleurs prendre un moment pour souligner tous les mots qui s’opposent : se rassembler/s’en aller ; faire/se reposer ; un peu/beaucoup ; un lieu désert/foule nombreuse… On pourrait aussi être attentif aux mouvements des différents personnages du texte : les apôtres, Jésus… Au fur et à mesure qu’avance le texte : où sont-ils ?
D’où partent-ils ? Où vont-ils ?

Opposition et mouvement

Et si vous lisiez le texte en adoptant la perspective d’un des personnages (Jésus, un apôtre, une personne de la « foule nombreuse »), je vous promets que vous allez découvrir encore d’autres aspects du texte (on peut faire cet exercice à plusieurs, en attendant l’apéritif ou pendant que les autres font la sieste !).

Le texte nous apprend qu’aux apôtres qui rapportent leur « faire » et leur « enseignement » (sans que l’on apprenne le contenu pour autant !), Jésus répond par l’invitation : « Reposez-vous un peu. » Est-ce que vous l’entendez comme une récompense ? Un repos « bien mérité » ? Ou plutôt comme une invitation à ne pas perdre de vue l’essentiel dans leur agitation de « tout bien faire » ?

Comment comprenez-vous d’ailleurs le « un peu » ajouté à l’invitation ? Comme une invitation quasi pédagogique à lâcher prise « doucement » (en commençant déjà avec « un petit repos ») ? Ou bien comme une indication que le repos ne sera que de courte durée ? La lecture que nous adoptons, tout en restant respectueux du texte, nous fait découvrir beaucoup sur nous-mêmes.

Ainsi, dans la première lecture que vous avez faite du texte, quelle place avez-vous spontanément considérée comme « la vôtre » ? Celle des apôtres ? Celle de quelqu’un de la foule ? Celle d’un lecteur, d’une lectrice, plutôt à distance, qui observe la scène de l’extérieur ?

Invitation et repos

Le texte nous offre encore une autre piste. Et elle pourrait s’avérer intéressante à creuser : le « re-pos » traduit très fidèlement le mot grec utilisé : le mot grec se dit anapauô. Le préfixe ana- peut signifier « de bas en haut », ou encore « de nouveau ». Le mot pauô a donné… « pause » en français !

Du coup, se « re-poser » n’est peut-être pas seulement un moment de détente et de relâchement, voire de sieste bien méritée, mais peut se révéler (comme vous le découvrirez dans ce passage si vous en poursuivez la lecture !) un déplacement en profondeur, un « re-positionnement » en quelque sorte. Ou, pour le dire autrement encore, une (petite) pause qui apporte du nouveau…

Et si notre lecture attentive de ces quelques versets pouvait aussi créer ces espaces-là ? Ces espaces de « re-pos » qui favorisent de nouveaux départs, de nouveaux regards sur le texte et des déplacements intérieurs qui nous font considérer autrement la vie, notre vie, et les êtres et les choses que nous rencontrons ? Et même si c’est court, le temps d’une traversée en barque (pourquoi d’ailleurs les personnes à pied sont-elles plus rapides dans le texte que les disciples en barque ?!), le ressourcement que procure un tel « re-pos » avec le texte biblique peut durer et ainsi avoir des effets bienfaisants à long terme. C’est ce ressourcement que je vous souhaite, que vous ayez le temps de vous re-poser « un peu » ou « beaucoup », « à l’écart », « en barque » ou encore au milieu de gens qui « vont et viennent » !