Comme son nom l’indique, l’épître aux Hébreux parle de la foi à un public qui connaît bien les coutumes du judaïsme. Pour ceux qui sont moins familiers avec les argumentations rabbiniques, elle a un style parfois déroutant.
Si nous savons l’interpréter, elle apporte des enseignements précieux et originaux. C’est notamment elle qui a développé de la façon la plus aboutie l’interprétation de la mort du Christ dans les catégories sacrificielles. Pour cela, elle relit la croix à la lumière de la fête du Grand pardon, le Yom kippour.
Pour Israël, le premier jour de l’année s’appelle Roch Hachana. Ce jour-là, la tradition dit que chacun passe devant Dieu comme un troupeau devant son berger. Dieu pèse selon sa justice les actions commises pendant l’année écoulée et décide du sort de chacun. Après Roch Hachana, s’ouvre une période de dix jours consacrée à la repentance, au retour vers Dieu. L’humain est invité à la pénitence, à la réconciliation, au pardon, au recommencement. À l’issue de ce temps de repentance, arrive Yom Kippour, le jour du Grand Pardon. Ce jour-là, le grand-prêtre offre un sacrifice et, symboliquement, Dieu descend de son trône de rigueur et de justice pour prendre place sur le trône du pardon et de la miséricorde.
Dans la pensée rabbinique, pour que le sacrifice soit parfait, il faut que le sacrificateur et l’animal sacrifiés soient sans taches. Comme ce n’est jamais le cas, le sacrifice devait être renouvelé tous les ans. La grande originalité de l’épître aux Hébreux est qu’elle fait de Jésus à la fois le sacrificateur est celui qui est sacrifié.
Comme Jésus est à la fois le grand-prêtre véritable et l’agneau sans taches, le sacrifice est complet et il n’a pas besoin d’être renouvelé. Il accomplit donc le sacrifice parfait qui correspond à la fin des sacrifices.
Depuis la croix, il ne peut y avoir de retour vers les vieilles pratiques religieuses, ce serait une reculade qui annulerait le caractère définitif du sacrifice du Christ.
Le trône du pardon
Dans l’épître aux Hébreux, nous entendons que le pardon, symbolisé par le sacrifice parfait, a été posé comme un acte sur lequel nul ne peut revenir. La grande bonne nouvelle du Nouveau Testament est que désormais, le Seigneur ne voit plus les humains d’un autre lieu que du trône de la miséricorde.
Le pardon n’est pas une simple décision sur laquelle Dieu pourrait revenir, il est scellé dans un acte qui a été accompli. On pourrait presque dire que, depuis la croix, le pardon de Dieu fait partie de son être.