Par Christian Ginouvier pasteur retraité, Toulouse
Les passages des évangiles des dimanches de janvier ne parlent pas du futur : ce qui pourrait arriver demain et après. Ils parlent d’avenir : ce que dès à présent (la parole est accomplie), il advient avec Jésus. Ils résonnent dans des temps difficiles et ne peuvent être reçus qu’avec hésitation, et répercutés qu’approximativement (voir Marie à Cana). Mais tous en témoignent, quelles que soient les adversités, les incertitudes pour chacun et pour tous, il advient quelque chose, il advient même Celui que, peut-être, l’on n’attend ni n’espère (plus).
Dans une nouvelle, « Le mari » (in Être un homme), Nicole Krauss évoque ainsi l’advenue, fragile, improbable, de bien beaux inattendus : « Jetant un regard à l’intérieur, [je] découvre le mari [venu d’on ne sait où] assis près du berceau […] qui parle tranquillement au bébé [pas trop désiré] dans sa langue étrange. L’instant n’est pas logique, il existe en dehors de la raison, mais il n’a rien non plus d’inauthentique… On sait maintenant que les gens qui nous arrivent de nulle part et de rien ne sont jamais que ceci : un cadeau, que nous recevons sans avoir eu l’idée de le demander, simplement émerveillés devant l’infinie prodigalité de la vie ». Voilà qui fait écho à cette belle leçon de Jacques Ellul où il en appelle « à l’inscription, l’insertion, l’infusion de la grâce et de la liberté dans ce monde où je me trouve, [pour] tenter de transformer son futur – inéluctable – en un avenir – à imaginer et à construire » (Éthique de la liberté).
En cette année nouvelle, nous sommes donc conviés, non point à rêver je ne sais quel futur, mais à saisir ce qui dès à présent et un peu partout peut advenir de bon. Et à en être, à notre mesure, avec d’autres d’où qu’ils soient, des annonceurs, des contributeurs, des promoteurs.