On peut penser que son contenu est peu intéressant parce que tardif. Mais, au contraire, on peut se dire qu’il est utile de savoir comment les chrétiens du second siècle ont pris en compte le temps qui est passé depuis le début du christianisme.
Deux aspects de la problématique de leur situation apparaissent dans notre épître. Ils vivent d’une part des débats théologiques qui peuvent être très déroutants, au sujet de l’interprétation des Écritures, et d’autre part un net découragement parce que le Jour du Seigneur, autrement dit la fin des temps, n’arrive toujours pas, alors qu’on avait imaginé imminent le retour du Seigneur.
Un seul jour est comme mille ans
On peut être choqué par la virulence avec laquelle le rédacteur de l’épître dénonce ce qu’il considère comme de graves dérives dans l’interprétation de la Bible. Mais n’est-il pas nécessaire, sans être aussi agressif, de dénoncer à notre époque des utilisations frauduleuses de la Bible, comme celles qui ont par exemple justifié il n’y a encore pas très longtemps, l’apartheid ou maintenant l’accaparement de terres, ou le fait de considérer et de traiter certains êtres humains comme des bêtes sauvages ?
La réaction de notre épître confrontée au retard de la venue du Jour du Seigneur nous pousse à une réflexion plus philosophique sur notre situation de croyants dans le temps. Face au retard de la venue du Royaume, il nous est dit, au chapitre 3, verset 8, que « Pour le Seigneur un seul jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour ». C’est la reprise et le développement d’une affirmation attribuée à Moïse dans le Psaume 90 au verset 4 : « Mille ans, à tes yeux, Seigneur, sont comme hier, un jour qui s’en va, comme une heure de la nuit. » Cette déclaration, unique dans la Bible hébraïque, met en évidence le contraste entre la brièveté de la vie humaine et ce que l’on peut appeler l’éternité de Dieu.
La visée de la formule sur le temps dans la seconde lettre de Pierre est un peu différente. Elle nous invite à relativiser notre perception du temps. Pour les lecteurs de l’époque il fallait, et c’était difficile, accepter que cent ans soient passés sans bouleversement final. Les chrétiens d‘aujourd’hui ont pour la plupart intégré le long étirement du temps depuis le premier siècle chrétien. Il n’en reste pas moins que le verset […]