Une «exclusion combinée à un manque de ressources»? Une fragilité qui tient à la nature même de l’humanité? L’acceptation d’un «manque de richesse associé au fait d’être humain»? De laquelle de ces trois pauvretés Jésus dit-il: «Bienheureux les pauvres»?…
Texte paru dans Foi&Vie 2018/4.
Dans la discussion avec l’économie et la sociologie, la théologie est appelée à travailler les attitudes qui conduisent à l’exclusion. En effet, celle-ci n’est pas seulement un problème économique ou moral, mais aussi une question spirituelle. C’est pourquoi elle fait l’objet d’une réflexion théologique. Dans le contexte de cette hypothèse et de l’investigation qu’elle suscite, dans un langage plus militant, la question théologique est de savoir comment un message libérateur peut être développé à partir de la tradition chrétienne en relation avec le problème de la pauvreté, et à quelles formes d’action ce message invite.
La pauvreté comme exclusion
Relevons d’abord qu’il est difficile de définir la pauvreté. En fait, une telle définition présuppose des décisions au sujet de ce qui constitue l’humanité: l’absence d’éléments constitutifs de l’humanité est alors appelée pauvreté. Ainsi, la compréhension de la pauvreté est une sorte de miroir de l’image de soi de l’être humain. Au cours des dernières décennies en Europe, des situations de vie très différentes ont été qualifiées de pauvreté: jeunes chômeurs, mères célibataires, familles nombreuses à faibles revenus, chômeurs de longue durée ou travailleurs dont les salaires ne sont pas suffisants pour une vie normale. Dans les pays pauvres, il faut également mentionner la pauvreté comme manque du nécessaire pour assurer la survie biologique. Ainsi les pauvres sont ceux qui souffrent de la faim.
En effet, on peut penser à la pauvreté en termes de besoins humains fondamentaux. Dans cette perspective, la nourriture, les vêtements, l’habitat sont pris en considération. Toutefois, cette définition soulève des difficultés. Il y a certainement des ressources biologiques minimales qui sont absolument nécessaires à la vie. Mais une telle définition ne tient pas compte du fait que ces besoins naturels sont directement liés à des questions sociales. Presque personne ne mange des aliments qui ne sont pas conditionnés par des pratiques culturelles: plantation, chasse, collecte, stockage, conservation, cuisson. Ces processus ne sont (presque) jamais le fait d’une personne isolée. Même pour se nourrir, l’être humain est dépendant d’une collectivité. La satisfaction des besoins biologiques passe ainsi par la relation avec d’autres personnes, et leur privation témoigne d’un problème dans cette relation.
Une deuxième tentative de définir la pauvreté consiste à décrire une culture de la pauvreté. Notamment dans les années 60 du 20e siècle, des sociologues ont essayé de prouver que les pauvres ont une mentalité spécifique. Ils sont en retrait par rapport à la […]