Pour le grand public, la première référence à la parentalité est sans doute la monoparentalité, mot des années 1970, avec le début de la chute du nombre de mariages et l’augmentation de celui des divorces.
Une évolution rapide
De plus en plus d’enfants sont élevés par un parent isolé, le plus souvent leur mère. La transformation des relations parentales à la suite des séparations devient manifeste avec la garde alternée (2002), l’éloignement géographique et éducatif d’un des deux parents et la variété des recompositions familiales, plus ou moins durables.
Plus générale ment, selon l’Ined il apparaît qu’en une cinquantaine d’années, la part des naissances hors mariage n’a cessé de croître jusqu’à représenter 62,2 % des naissances en 2022, rendant les rôles parentaux plus flous. Par ailleurs, au fil des dernières décennies, les progrès de la procréation assistée rejoignent les demandes d’ouverture du droit parental formulées dans la perspective d’une « parentalité d’intention », en marge de la qualité parentale a priori associée aux géniteurs de l’enfant.
Ce faisant, la diversification de la société fait coexister des pratiques parentales en tension avec l’évolution des normes sociales. Selon leurs origines culturelles et leurs attachements religieux, plusieurs groupes revendiquent des conceptions traditionnelles de l’autorité parentale, en contraste, voire en opposition, avec les tendances postmodernes liant liberté individuelle du parent et respect d’un cadre légal de parentalité.
Les inégalités socio-économiques et socioculturelles se traduisent souvent dans la difficulté, pour certains parents, à accompagner la socialisation de leurs enfants dans un monde dont ils ne comprennent pas la complexité. Le spectre contemporain des configurations parentales est large et la néoparentalité ne concerne pas tout le monde 2.
Pratique, expérience, exercice
Il en découle que l’usage banalisé du terme de parentalité ne préjuge en rien d’un sens univoque. Pour désambiguïser ce concept, le pédopsychiatre Didier Houzel différencie trois axes d’interprétation de la parentalité : la pratique, l’expérience et l’exercice 3. La parentalité comme pratique recouvre l’en semble des soins physiques ou psychiques apportés par les parents à l’enfant pour asseoir son développement et son éducation. Les pratiques peuvent différer fortement d’un milieu social ou culturel à l’autre, d’une époque à l’autre. L’expérience de la parentalité correspond au vécu subjectif du devenir parent et de l’être parent.
Ici, l’accent est mis sur les enjeux psychiques de la relation à l’enfant du point de vue de l’adulte-parent, de la gestation à l’âge adulte. L’exercice de la parentalité, enfin, rend compte du cadre juridique des droits et obligations des parents à l’égard de l’enfant et au regard de la société. À ce titre, les parents sont mis en présence d’institutions publiques qui peuvent les accompagner et les soutenir mais aussi les contrôler et les sanctionner : Éducation nationale, action enfance-jeunesse, allocations familiales, justice…
Avant d’évoquer de nouveaux liens de parentalité, il est donc essentiel de discerner en quoi ils sont nouveaux. Et il est important de comprendre la dynamique d’évolution de la responsabilité paren tale dans ces trois dimensions, différentes mais interconnectées.
Par Denis Malherbe, maître de conférences émérite des universités, HDR en sciences humaines et humanités nouvelles