Générer une discussion entre les joueurs de tous âges. Et ce, qu’ils soient chrétiens ou pas et même non-croyants. Le jeu de cartes Playspi est le fruit d’un long cheminement. Agnès Charlemagne, sa conceptrice, a derrière elle une longue expérience d’animatrice en pastorale à Marseille et d’atelier pour les enfants, les jeunes et les adultes. Au fil des ans, elle a recueilli assez de verbatims d’enfants et d’adolescents pour écrire T’es où ? un livre dans lequel les jeunes parlent de Dieu. Certaines de ses phrases ont été anonymisées et inscrites sur les cartes du jeu. « Il y a 100 cartes réparties dans trois catégories : les verbatims de jeunes, des versets bibliques, des citations théologiques ou littéraires. Elles vont aider les joueurs à comprendre le raisonnement des autres. Nous ne sommes pas dans une partie de Trivial Pursuit, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses, l’objectif est de susciter des réactions, une réflexion joyeuse, mais aussi d’être à l’écoute des autres, de nous, du divin qui est en nous. On n’a pas besoin d’être croyant pour ça », explique Agnès Charlemagne.

L’idée du jeu a germé dans l’esprit de celle qui a été formée à l’Institut de Sciences et Théologie des Religions de Marseille et s’inspire de la pédagogie Montessori, il y a à peu près un an. « J’ai publié un manuel pédagogique pour les animateurs d’atelier. Il suit les trois corps de textes de Playspi, qui sont tricotés les uns avec les autres. À ce moment-là, je me suis dit que si nous avions des cartes, ce serait plus ludique », raconte-t-elle. Une manière de transposer les ateliers à la famille. D’ailleurs, pour que les plus jeunes puissent participer, des dessins illustrent les cartes. « Ils s’inspirent de la vie quotidienne ou biblique. Comme cela, il est possible de jouer dès 8 ans », poursuit Agnès Charlemagne. Les illustrations ont été réalisées par l’artiste Caspar Noyon, qui n’est autre que le fils de la conceptrice du jeu.

« Ils osent dire ce que les adultes pensent »          

En faisant discuter les joueurs de la foi, Agnès Charlemagne, qui a pu concrétiser son idée grâce à l’aide de l’équipe interconfessionnelle de Ze Bible, espère lutter contre le repli identitaire et le manque de dialogue en général. Son expérience sur le terrain lui a permis de constater que les ados ne se désintéressent pas de tout comme certains le croient. « Ils réagissent lorsqu’ils entendent des choses subversives. Et puis, ils sont sans filtre. Ils osent dire ce que les adultes pensent, comme ‘Je crois tout de Dieu sauf qu’il a ressuscité’, ‘Les histoire de la Bible c’est des mythes ou c’est vrai ?’ ou encore ‘Être croyant c’est juste une assurance-vie pour ne pas être responsable’.

Édité par Bibli’o, le Playspi débute ainsi. Après distribution des cartes (neuf par joueur), le premier joueur pose une carte « verbatim » qui l’intéresse et il explique pourquoi. Les autres réagissent et répondent avec une carte qui, selon eux, a un lien avec la carte précédente et ainsi de suite. « Ça a du sens de faire connaître la Bible avec les cartes, c’est presque un domino de pensées qui s’ajuste. Un gros travail de sélection a été effectué pour que tout soit en lien, mais il s’agit bien d’un jeu ludique, poursuit-elle. Et en jouant, les participants se rendent compte que la Bible est parfois aussi subversive que les ados du XXIe siècle », ajoute la dynamique conceptrice. Les citations théologiques ou littéraires ne sont pas en reste : elles font aussi cogiter les joueurs. Parmi elles, celles du patriarche Athénagoras Ier de Constantinople selon qui « la plus dure des guerres est de se désarmer » ou celle de la religieuse Isabelle Le Bourgeois qui incitait à se demander : « Ai-je aimé ? Ai-je été aimée ? ». Une carte blanche permet, quant à elle, de noter d’éventuelles belles phrases dites pendant la partie, afin de compléter le jeu.

Taquine quant à l’idée de grands tout-mous qu’ont certains des adolescents, Agnès Charlemagne précise : « Les enfants peuvent jouer et les grands-parents s’étonner de joie que le petit-fils pense ». Et puis, comme elle l’y invite si bien « rien n’empêche de lire une carte différente chaque jour, pour méditer », en attendant d’avoir des partenaires de jeu. 

À partir de 8 ans. De 1 à 6 joueurs. 24 € sur le site editionsbiblio.fr