Une vieille maison à la campagne, en Dordogne, voilà le nouveau cadre de vie de Yolène, Christophe et de leur fils Abel. Les occasions offrent parfois la possibilité de changer de vie. Ils ont quitté le voisinage du territoire de Belfort pour s’installer dans ce lieu et se consacrer à l’accueil.

Changements de vie radicaux

À la suite d’un accident, après un temps long de rééducation, les séquelles sont parfois trop lourdes pour reprendre le cours de sa vie. Certaines personnes âgées abandonnent la gestion de leur quotidien et ce sont les familles qui prennent le relais. Les conséquences physiques ou psychologiques obligent les familles à placer leur parent en institution ou à le garder à la maison pour s’occuper de lui à temps complet.
L’expérience de Yolène en institut médico-éducatif (IME) lu i a donné l’idée de créer cet accueil particulier. Elle accueille au sein de sa famille une personne handicapée le temps d’un week-end ou pour un temps de vacances.

Les familles, même si cela leur coûte, réalisent souvent qu’elles ont besoin d’un temps de repos pour recharger leurs batteries. Elles confient leur mari, leur enfant, leur parent à Yolène qui intègre ce nouveau membre à sa famille et adapte une partie de sa vie à son invité.
Certaines institutions utilisent cet accueil pour permettre à certains de leurs patients, qui n’ont pas de famille, de changer d’air, de vivre un temps pour eux hors du rythme pesant des instituts.

Cette décision, pour les familles en particulier, est souvent difficile : comment confier son proche à une inconnue alors que voilà des mois voire des années que l’on s’occupe de lui au quotidien ? Le diplôme d’éducatrice spécialisée de Yolène est parfois un frein (« Sait-elle mieux que moi s’occuper de mon malade ? ») et souvent un avantage (« quelqu’un sur qui je peux me reposer en toute confiance »).
Bien sûr, la relation personnelle est forte. Yolène aime pouvoir planifier un temps de rencontre avec les familles qui vont confier leur proche. « Dans la rencontre, il y a des non-dits qui en disent long. » avoue Yolène avec douceur.

Le lien intergénérationnel

Jusqu’à présent, la famille de Yolène accueille des personnes adultes, plutôt âgées, au-delà de 50 ans. Yolène témoigne : « Nous avons beaucoup à apprendre des gens autour de nous, qui vivent avec nous. » Bien sûr, Yolène est aux petits soins pour ses invités. Elle s’adapte à leur rythme, les laisse profiter de ce qui est pour eux aussi un temps à part, un temps de vacances. « Même si ces personnes ont besoin d’aide, elles apportent aussi à la famille en bousculant gentiment nos habitudes. »

Un des atouts majeurs de cet accueil, c’est Abel, 3 ans. La joie de vivre de leur fils apporte beaucoup aux accueillis. Il se réjouit dès qu’un nouvel invité arrive. En fonction de l’âge, c’est papi ou mamie, ou alors ami.

Un enfant de son âge ne juge pas. Yolène raconte qu’il a réalisé, au bout de quelques jours, pour la première fois, qu’un accueilli avait la peau noire… Mais pourquoi n’est-il pas noir, lui ? Il aurait tant aimé être noir lui aussi ! Une naïveté à toute épreuve trouvant parfois bizarres, souvent rigolos les invités qui viennent passer des séjours dans sa maison de famille.

Là, se vit au quotidien une véritable transmission entre les générations. Une transmission du plus vieux au plus jeune mais aussi du plus jeune au plus vieux.

Yolène donne l’exemple de cet accueilli, qui tous les samedis, achète son journal même s’il ne peut pas lire, mais il raconte ce qu’il voit à Abel et lui transmet à la fois des informations à sa façon et des souvenirs plus personnels. Mais c’est aussi Abel qui transmet à son tour aux invités. Il leur montre les tâches du quotidien, où se range la vaisselle que l’on sort du lave-vaisselle. « Ce sont ces petites richesses du quotidien qui permettent de se rencontrer », ajoute Yolène, « qu’il s’agisse de la multitude de visiteurs (amis et famille) qui sont venus nous donner des coups de main pour la mise en place du projet ou d’accueil dans un cadre plus professionnel, le « vivre avec » et le « faire ensemble » sont vraiment essentiels à mon quotidien ! »

Un partage du quotidien

Vivant à la campagne, Yolène et sa famille commencent à cultiver un potager, élèvent des poules. Avec les accueillis, ils partagent la gestion de la vie à la campagne. « L’histoire des autres nourrit notre histoire » pourrait devenir la devise de notre famille d’accueillants.

Par intérêt et par goût, Yolène prépare et cuisine le plus de choses, elle-même. Pour cela elle amène ses invités dès les premiers jours au moulin voisin où elle achète sa farine pour la fabrication du pain, entre autres. Elle profite de l’occasion pour faire une visite du lieu et de son fonctionnement. De retour à la maison, tout le monde met la main à la pâte pour préparer les repas : « Il n’y a pas toujours les mots, mais il y a des sourires qui parlent d’eux-mêmes. »

« Je souhaite souligner combien les fêtes qui rythment l’année sont des moments privilégiés de partage. Aussi je me réjouis particulièrement d’accueillir une personne si je sais qu’elle va partager avec notre maisonnée son anniversaire, celui d’un des membres de ma famille, une fête… D’ailleurs, ça ne s’invente pas mais le premier séjour s’est fait à la période de Noël ! » conclut Yolène.

Il est important voire essentiel de replacer l’humain dans son humanité. L’expérience proposée par Yolène et sa famille doit nous inspirer chaque jour des gestes de solidarité et de fraternité.