Sitôt investi, Donald Trump a décidé début février de geler temporairement le financement du Plan d’urgence du président pour la lutte contre le sida (PEPFAR) ainsi que toute autre aide étrangère pour une période d’au moins 90 jours. L’organisation non gouvernementale Médecins sans frontières (MSF) alerte sur cette décision et plaide pour une restauration totale de l’aide américaine. « Plus de trois semaines après le gel des financements du PEPFAR par le gouvernement américain […] Nos équipes constatent que des personnes ont déjà perdu l’accès aux soins vitaux dans de nombreux pays et ne savent pas si/ou quand leur traitement reprendra », a indiqué Avril Benoît, directrice générale de MSF USA. Dans un communiqué publié le 14 février, MSF a décrit comment de nombreuses cliniques fournissant des services VIH, comme des tests, les traitements et la PrEP, avaient été fermées en Afrique du Sud. Elles ont laissé « les patients désemparés, ne sachant pas comment obtenir leurs médicaments vitaux », a écrit l’ONG. Pour rappel, le VIH contamine 1,3 million de personnes par an. Le sida reste la cause de 630 000 décès par an dont 60 % en Afrique.
En République démocratique du Congo, le modèle de distribution d’antirétroviraux est aussi affecté par le gel de l’aide américaine. « Des milliers de personnes se retrouvent sans assistance, avec un risque élevé de développer un VIH avancé », a précisé Médecins sans frontières dans son communiqué. « Chaque jour qui passe est une urgence pour les millions de personnes pour qui PEPFAR est une bouée de sauvetage », a ajouté Avril Benoît. Les programmes soutenus par le PEPFAR ont été intégrés dans le système de santé des pays partenaires depuis plus de vingt ans et ont permis de sauver plus de 25 millions de vies du sida. Ces interruptions dans le financement sont jugées « préoccupantes » par MSF, qui demande aux États-Unis de « reprendre immédiatement le financement de toutes les aides humanitaires et sanitaires critiques, y compris l’ensemble des opérations de PEPFAR ».
Des essais cliniques suspendus
Avec le programme PEPFAR, lancé par George W. Bush en 2003 pour aider les pays à faible revenu à accéder aux médicaments antirétroviraux, « le gouvernement américain prend en charge 20 des 30 millions de personnes sous traitement », explique Le Monde. Il fournit aussi 90% des PrEP, qui permettent d’éviter la contamination des personnes à risque. « Des gens vont mourir », a averti une source à l’hôpital universitaire de Juba, au Soudan du Sud, où le centre de traitement du VIH a réduit ses activités. La communauté scientifique est aussi impactée par ce gel des aides américaines puisque des essais cliniques ont été suspendus. La première phase d’expérimentation de deux vaccins contre le VIH dans huit pays d’Afrique devait débuter fin janvier. « Nous sommes stupéfaits de ce qui est en train de se passer », a indiqué Yazdan Yazdanpanah, directeur de l’Agence nationale de recherche sur le sida. Il a aussi rappelé que « la lutte contre le VIH est devenue, au fil des années, un modèle de coopération internationale exemplaire ». De nombreux médecins redoutent une reprise de l’épidémie de sida, une hausse de contaminations et une augmentation des morts liées à la maladie.