Dix ans jour pour jour après l’attentat de Charlie Hebdo, le journal satirique publie un numéro spécial disponible à partir du 7 janvier 2025. La Une est choquante, comique, « Charlie ». On y voit un lecteur assis sur le canon d’un fusil d’assaut lisant ce fameux numéro historique intitulé « increvable ». Parmi les 32 pages choisies minutieusement, une quarantaine de caricatures sur le thème « rire de Dieu » illustrent ce numéro symbolique. L’hommage aux huit membres de la rédaction tombés sous les balles des terroristes passe par le dessin et le rire, comme « Charlie » a toujours su le faire. « Si on a envie de rire, c’est qu’on a envie de vivre. Le rire, l’ironie, la caricature sont des manifestations d’optimisme. Quoi qu’il arrive de dramatique ou d’heureux, l’envie de rire ne disparaîtra jamais », déclare Riss, directeur du journal, dans l’édito du futur numéro.
Un catalogue de ce qu’est la liberté d’expression
Au-delà d’un numéro « anniversaire » ou « hommage », l’hebdomadaire n°1694 est un catalogue de la liberté d’expression. Les 40 caricatures sélectionnées sont les « plus efficaces et les plus abouties » d’une présélection de 350 dessins reçus par les équipes de Charlie Hebdo. Le Huff Post décrit l’un d’eux représentant un Christ en croix se filmant avec un téléphone avec un sous-titre prévenant que « le petit oiseau va sortir ». Un autre, à l’habile idée de mettre en scène, un dessinateur se demandant si dessiner « un type qui dessine un type qui dessine Mahomet, ça va ? ».
En plus des multiples caricatures, ce nouveau numéro publie les résultats d’une étude menée en juin 2024 par l’Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès sur la question de la liberté d’expression. D’après le sondage, 76% des Français estiment que « la liberté d’expression est un droit fondamental » et que « la liberté de caricature en fait partie ». Un chiffre qui rappelle combien la liberté d’expression et de caricature sont importantes. Pour Riss, la remise en cause de ces dernières pourrait venir de la « démocratie elle-même qui se trouve menacée par des forces obscurantistes renouvelées ».
L’esprit Charlie
Les jours qui ont suivi l’attentat de Charlie Hebdo, plus de quatre millions de personnes en France sont descendues dans la rue avec l’envie de partager un message d’espoir, de tolérance et de vivre-ensemble. D’une voix commune, « Je suis Charlie », résonnait dans le pays. Certains citoyens sont même devenus des symboles de cette union passée à l’image du réalisateur Charles Bousquet. D’un simple geste, celui qui avait 22 ans à l’époque, décide d’emprunter un crayon géant à un autre manifestant. Cet objet du quotidien, symbole de la liberté d’écriture et d’expression, va alors devenir le « Crayon guidant le peuple ».
En 2021, il confiait à France 3 Occitanie être resté perché plusieurs heures sur l’une des statues du « Triomphe de la République », situé place de Nation à Paris, crayon géant à la main. Photographiée par deux journalistes, l’image de Charles Bousquet debout sur la statue, crayon brandi vers le ciel, fait rapidement le tour des réseaux sociaux et des médias du monde entier. Le Monde (France), The Times et The Daily Telegraph (Grande-Bretagne), El Periódico et La Razón (Espagne), La Repubblica (Italie), La Libre Belgique (Belgique), l’affichent en Une de leur édition du 12 janvier 2015. Une version XXL de 13 mètres sur 8 sera même affichée sur la façade du Centre Pompidou à l’initiative de l’ex-ministre de la Culture et de la Communication Fleur Pellerin, précise le journal.
Le 7 janvier 2015, l’attentat de Charlie Hebdo perpétré par les frères Kouachi a fait douze victimes, parmi lesquelles huit membres de la rédaction du journal : les dessinateurs Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski, la psychanalyste Elsa Cayat, l’économiste Bernard Maris et le correcteur Mustapha Ourrad.
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