La Russie enfonce le clou. Alors que les députés russes ont voté, le 24 novembre, l’extension d’une loi anti-LGBT adoptée en 2013 qui vise à interdire la “promotion de relations sexuelles non traditionnelles” auprès de tous les publics dans les médias, sur Internet, dans les livres et dans les films, note France 24, cette législation préoccupe vivement le monde de l’art, qui craint un redoublement de la censure, qui est déjà très forte. Notamment du cinéma. Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde, le spécialiste du cinéma russe, Joël Chapron, explique que le septième art “restait il y a encore peu de temps, avec Internet, le seul vecteur visuel d’une culture ‘alternative’”. Mais désormais, “la mainmise de l’État russe à tous les niveaux, du financement à la sortie des films, étouffe de plus en plus ce dernier espace de création.” 

Crainte que “la liste des interdictions s’allonge”

Si la censure a officiellement été abolie en 1993, indique le spécialiste, quelques films ont, durant les décennies précédentes, été interdits. Il prend exemple de La Mort de Staline d’Armando Iannucci (2017), de Russie 88 de Pavel Bardine (2009) ou de La Fête d’Alexeï Krassovski (2019). “Depuis le 24 février, reprend Joël Chapron, le nombre de films qui n’accèdent plus aux écrans croît de manière exponentielle. Il semblerait qu’une cinquantaine de films tournés avant l’invasion et dont certains acteurs ont pris fait et cause contre la guerre aient rejoint une ‘liste noire’ de films qui ne sortiront pas.

Il y a peu, le visa d’exploitation du documentaire La Famine d’Alexandre Arkhanguelski et Maxime Kournikov sur la famine organisée par Staline en 1932-1933 a été retiré, écrit le spécialiste du cinéma russe. La raison ? Le film “diffuse des informations dont la propagation est interdite dans la Fédération de Russie.” D’autre part, il note que la “liste des interdictions s’allonge sans base juridique précise.” Et craint que certaines œuvres cinématographiques, actuellement en phase de production, ne voient jamais le jour.