« Free State of Jones » est d’abord un film sur la Guerre civile américaine (1861-1865) : le conflit le plus meurtrier de l’histoire des États-Unis.
De la guerre des autres à la lutte pour l’autre
Le film est cru, ne cachant rien des horreurs de ce que fut la première guerre moderne de l’Histoire, avec tranchées et charges meurtrières aussi sanglantes que celles de la Grande Guerre. Il nous montre aussi la dure condition des esclaves et les inégalités au sein même de la société du Vieux Sud, entre pauvres fermiers blancs et riches planteurs esclavagistes. L’alliance entre esclaves en fuite, petits fermiers et déserteurs confédérés contre la Confédération et des riches planteurs, est le point de départ de cette épopée qui verra Newton Knight, infirmier confédéré déserteur, créer pour ces hommes libres ou libérés, l’État Libre du comté de Jones. Mais le film ne se limite pas à la dernière année de la guerre civile, il nous décrit les dix années qui suivirent, avec l’émergence du Ku Klux Klan et d’un système de ségrégation raciale qui demeurera jusqu’en 1964. Le film montre aussi que la guerre c’est aussi des fermiers dépossédés de leurs biens par leur propre armée, des femmes abattues, de jeunes garçons pendus, les crimes impunis du Klan… et ces violences racistes envers les noirs se prolongeant au-delà de la capitulation de la Confédération… jusqu’à 1948 et peut-être même jusqu’en 2016 !
« Ce qu’un homme aura semé, il le moissonnera aussi. » (Galates 6,7) Mais « Free State of Jones » est aussi un « film chrétien » avec de fortes références bibliques où se mêlent combat patriotique utilisant l’Écriture, défense de la liberté de tous « les enfants de Dieu » et le droit à la propriété personnelle : autrement dit, l’idée que chacun doit pouvoir vivre du fruit du travail de ses mains. En effet, dès le départ, la foi de Newton, et d’autres protagonistes, est mise en avant. Ainsi Newton dira à son neveu mourant, « Jésus t’aime »; et plus tard, son nouvel ami, Moïse, esclave en fuite, dira que « personne ne peut posséder un enfant de Dieu ». Ce film nous montre aussi deux enterrements que Newton préside, Bible en main. L’église y est aussi montrée comme le lieu de rassemblement de la communauté des hommes libres, noirs et blancs ; après la défaite du Sud, le Ku Klux Klan viendra la menacer (ils pendront Moïse et brûleront l’église). Car la guerre terminée, le film nous décrit la lutte des anciens esclaves pour survivre dans une culture qui les méprise et surtout pour acquérir les droits que leur a donnés le Congrès en 1865 : notamment le droit de vote, que les démocrates du Sud refuseront un siècle durant, dans certains états, notamment le Mississipi.
« C’est pour la Liberté que vous avez été libérés. » Au final, « Free State of Jones » est une histoire fascinante que le réalisateur et scénariste Gary Ross nous livre de façon épique et dramatique à la fois, et servie par un Matthew McConaughey, comme toujours formidable, dans la peau de Newton Knight, homme à la fois brutal et sensible. Enfin, alors que nos sociétés ont parcouru un long chemin depuis ces jours sombres, la leçon de compassion et de lutte pour les droits des autres de ce film, ne doit jamais être oubliée. De même que le combat pour la liberté et le droit de pouvoir « récolter ce que nous semons », comme l’avait écrit Paul aux Galates.