Leurs libres propos évoquent leur expérience passée avec l’ACO. Un livre du centenaire va restituer ces entretiens. Brefs extraits.

Jacques Mattey, Suisse, 1er président de l’ACO Fellowship

“En Orient, quand on construit une maison, on construit d’abord un étage, et on plante les piquets pour la suite, en attendant l’arrivée des finances ou du matériel qui permettront de continuer. C’est une leçon intéressante au niveau de la réflexion sur notre capacité à prévoir, cela doit nous conduire à plus d’humilité – ce qui n’est pas sans lien avec la compréhension de la foi…”

Ernest Mathis, président de l’ACO France

“Mon engagement dans l’ACO a enrichi ma foi chrétienne. Mon ouverture vers l’autre, tout simplement, a été modifiée. J’ai reçu cet appel comme une valeur essentielle de ma foi, cette ouverture et cette compréhension de l’autre. J’ai essayé de suivre cette voie de toutes mes forces, de toute ma patience de président, souvent mise à mal. Aimer les Orientaux, cela m’a ouvert tout un horizon.”

Anie Boudjikanian, Liban, présidente de l’ACO Fellowship

“L’ACO, c’est ‘la foi partagée dans l’action’, cela va au-delà de votre propre compréhension : une expérience fascinante. Les trois membres donateurs de l’ACO ont élaboré une stratégie nouvelle et unique. Cette organisation démocratique de six familles agit sur pied d’égalité, donneurs ou receveurs de grandes ou petites sommes. Être membre d’un tel organisme missionnaire, et non plus d’une simple ONG, a été pour moi un véritable défi dans ma façon de comprendre l’engagement chrétien.”

Ernest Reichert, directeur de l’ACO France

“Mon expérience ACO m’a beaucoup apporté dans ma propre vie, car j’ai découvert un autre monde, par bien des côtés très différent de notre société et de notre Église. En Orient, j’étais toujours en prise directe avec les gens, je partageais leur quotidien, leurs références, leurs repères, différents de ceux des sociétés occidentales. Nous avons tendance à juger selon nos critères, ecclésiaux, culturels, humains. Cela n’a jamais été évident de faire se rencontrer les deux réalités culturelles et spirituelles.”

Jean-Claude Basset, Suisse, envoyé à Téhéran

“Pour moi, l’ACO a été en premier lieu la rencontre d’un christianisme pluriel avec la richesse que représentent les différentes sensibilités arméniennes, assyro￾chaldéenne, arabe, copte… Cela a remis en cause la réduction de l’œcuménisme aux relations catholiques-protestantes que nous connaissons en Occident. J’ai notamment découvert le riche héritage des traditions syriaque, arménienne ou copte, en marge de ce qui devenu la grande Église.”

Mgrditch Karagoesian, Liban, président de l’ACO Fellowship

“L’Église que je préside a beaucoup d’Églises partenaires. Elles nous écoutent. Nous les écoutons. Nous avons besoin d’aide, elles nous aident. Mais avec l’ACO, c’est la première fois qu’on nous demande notre avis ! D’autres partenaires ont fait la même démarche, mais sans que nous ne participions à la prise de décision : ce sont eux qui décident de ce qu’ils veulent donner.”

Gilbert Léonian, Arménie, pasteur de l’Église arménienne en France

“Une image ACO m’a marqué. Jeune étudiant, je suis invité pour une conférence sur l’Arménie avec le pasteur Berron. J’ai 21 ans et je n’oublierai jamais l’émotion dans sa voix et les larmes dans ses yeux lorsqu’il a retracé le parcours douloureux du peuple arménien. Et je me suis dit : cet homme est habité par la compassion du Christ.”

Marc Schoeni, Suisse, envoyé à Beyrouth

“Une réalité qui m’a fait beaucoup plaisir, c’est de voir ce que sont devenus mes anciens étudiants. Ceux qui sont aujourd’hui à la barre de leur Église, et dont on lit les réflexions dans le Levant et ailleurs, alors qu’ils se trouvent confrontés à des crises majeures, guerre en Syrie, crise économique et politique au Liban, m’impressionnent. Ce qu’ils font, leur capacité de résistance, leur prise d’initiatives pastorales et diaconales, sont simplement extraordinaires.”

Bchara Moussa Oghli, Syrie, pasteur à Alep 

“J’ai découvert que ceux qui ont écrit la Bible étaient comme moi : ils traversaient le feu et vivaient sous une tension extrême. Si vous ne vivez pas ce genre de tension, vous ne pouvez pas comprendre la Bible. Comprendre la Bible, ce n’est pas seulement un problème textuel et historique, c’est une expérience essentiellement spirituelle.”

Frédéric Gangloff, France, envoyé à Beyrouth 

“Définitivement, cette expérience d’envoi ACO a radicalement changé ma manière de vivre. Je garde au fond de moi la manière proche-orientale de relativiser un certain nombre de choses. Mes divers séjours au Proche￾Orient m’ont sensibilisés au terrorisme, à des épisodes de confinement, de privations et de tensions… Cela permet de relativiser beaucoup de choses que nous vivons actuellement !”

Martin Burkhard, Suisse, envoyé au Caire

“Il est clair que j’ai beaucoup reçu en Egypte. Quand aujourd’hui j’entends un chant en arabe, j’ai le cœur en flamme, quand j’entends des nouvelles tristes, je suis affligé. J’aime le Proche-Orient et je promeus volontiers sa beauté, sa ou ses civilisations, ce qui est souvent occulté par des agissements de groupuscules stupides ou de gouvernements corrompus. Grâce à l’ACO, j’ai pu vivre dans un pays à très grande majorité musulmane et avoir une approche approfondie et gratifiante de l’islam.”

Joseph Kassab, Liban, président de l’ACO Fellowship

“Au départ, dans l’Église du Synode Arabe que je dirige, nous avions trop à faire avec nos problèmes économiques et nos guerres. Au contact de tous nos partenaires, nous avons cependant appris à sortir de nos murs, à aller au-delà de notre propre identité, pour devenir nous aussi une Église missionnaire, à l’image de nos trois partenaires européens de l’ACO. Ceci est en partie le fruit de notre expérience œcuménique, mais nous vient aussi de notre association avec l’ACO.”

Propos recueillis par Thomas Wild et Wilbert Van Saane, mis en forme par Albert Huber