Durant presque un siècle, Jacques Nompar de Caumont, seigneur puis duc de la Force, pair de France, sera un acteur et témoin privilégié d’une époque déterminante pour le protestantisme français.

Une famille protestante du Sud-Ouest

Jacques Nompar naît le 30 décembre 1558 dans la famille de Caumont dont plusieurs membres sont de fervents protestants. Ce n’est donc pas étonnant que la famille se rend à Paris en août 1572 pour assister au mariage d’Henri III de Navarre avec la fille du roi de France. Mais le 24 août, le drame arrive : c’est la Saint-Barthélemy. François de Caumont et ses fils échappent de justesse, mais comme les tueries continuent plusieurs jours, le 25, ils tombent dans une embuscade. François, le père, et Arnaud, le fils aîné, sont tués. Jacques a la vie sauve parce qu’il fait le mort, caché sous les corps. Il en dira ceci dans ses Mémoires : « Le père marchait le premier ; son fils aîné ensuite et le cadet venoit le dernier. Étant arrivés au fond de la rue des Champs, les soldats crièrent : Tue, tue ! […] Il se laissa tomber entre son père et son frère, Dieu le protégea si visiblement que, quoique les meurtriers les dépouillassent, ils ne reconnurent jamais qu’il y en avoit un qui n’avoit aucune blessure ».

Une carrière au service des rois de France

C’est aux côtés du roi Henri III de Navarre que Jacques va faire ses premières armes, compagnon dévoué qui restera auprès de son roi jusqu’à la mort de celui-ci. Il sera de toutes les grandes batailles : Paris, Chartres, Rouen entre autres. Lorsqu’Henri de Navarre monte sur le trône de France sous le nom d’Henri IV en 1589, Jacques Nompar de Caumont deviendra intendant du Béarn et de Navarre, obtient le titre de sieur, puis de duc de la Force et devient capitaine de la garde royale. C’est à ce titre qu’il se trouve dans le carrosse royal le 14 mai 1610 quand Ravaillac assassine le roi. Il raconte dans ses Mémoires : « Le scélérat donna deux coups de couteau dans le ventre du Roi qui au premier s’écria : « Je suis blessé ! » et au deuxième : « Ce n’est rien ! » mais dans le même temps il jeta une si grande quantité de sang par la bouche que cela l’étouffa. Le sieur de la Force lui cria : « Ah ! Sire, souvenez-vous de Dieu ! » »

Henri IV meurt ainsi dans le bras du duc de la Force.

Désormais, Jacques devra être au service de son successeur Louis XIII qui veut en finir avec la présence des protestants dans son royaume. Dans un premier temps il va s’opposer au roi en défendant les places fortes protestantes, notamment Montauban. Mais, en 1622, Louis XIII remonte la Dordogne pour soumettre les villes du Périgord et le duc de la Force se trouve à défendre le bastion protestant de Sainte-Foy-la-Grande. L’expédition punitive royale est sanglante, avec notamment le massacre de Montcaret en janvier. Voulant éviter ce sort aux habitants de la ville, le duc de la Force se rendra le 25 mai.

Fidèle au royaume de France Louis XIII, qui par ailleurs connaissait bien et appréciait le duc de la Force, l’intégrera dans sa propre armée : il le fait maréchal et érige la Force en duché-pairie en 1637, « pour services rendus ». Jacques Nompar continuera sa carrière militaire pendant de longues années encore, puisqu’on le trouve à 76 ans devant la forteresse de la Mothe en Lorraine.

Il décèdera à l’âge de 93 ans, le 10 mai 1652, dans son château de la Force.