Le sanctuaire marial de Notre-Dame de Piété de Garaison : Lourdes avant Lourdes

En 1515 , une petite bergère, Anglèze de Sagazan, qui garde son petit troupeau de brebis près d’une source, reçoit une vision de la Vierge. Celle-ci lui promet : « Ici je répandrai mes dons. » Une chapelle est construite, les pèlerins commencent à affluer car des miracles ont lieu et, rapidement, en 1540, on construit une église plus grande, celle qui existe encore aujourd’hui. Jusqu’à ce qu’en 1858 une autre petite bergère commence à recevoir des visions à Lourdes, ce sanctuaire sera le lieu de pèlerinage marial le plus important du sud de la France. Il sera décoré au XVIIe siècle d’une sorte de bande dessinée de peintures murales qui raconte les pèlerinages et les miracles qui y ont lieu, dans un style très naïf mais superbe. Aujourd’hui, la chapelle est insérée dans un ensemble conventuel qui abrite une école privée avec internat mais ouverte au public.

La guerre des religions et le miracle de la statue

Le Comminges, c’est ce couloir de la Garonne au sud de Toulouse, pris entre le pays de Foix et le Béarn. C’est-à-dire un enjeu politique essentiel entre le royaume de Navarre (dont fait partie le comté de Foix) et celui de la France, ce qui va se traduire au XVIe siècle entre un royaume passé au protestantisme avec Jeanne d’Albret et celui de la France où les guerres de religion se succèdent. Le Comminges reste relativement imperméable aux protestants, notamment grâce à l’influence des évêques du Comminges qui sont également de grands propriétaires terriens. Mais, même ici, il y aura des épisodes de violence. N.-D. de Garaison va être le théâtre de l’un d’eux.

Le 22 avril 1586, le capitaine Gabriel Antoine de Sus, protestant et partisan du futur Henri IV, qui n’est encore que le roi Henri III de Navarre mais le seul prétendant restant au trône de France vacant depuis deux ans, effectue avec ses troupes une campagne en Comminges et arrive devant le sanctuaire de Garaison. Pris de rage devant la statue de la Vierge vénérée par les pèlerins, il fait allumer un grand feu. Car il a cru qu’elle était en or : hélas la statue n’est qu’en bois doré… Et là, miracle ! Lorsqu’après deux longues heures la troupe est repartie, les pèlerins se rendent compte que la statue est restée intacte !

Les fresques

Cet épisode va rentrer dans la série de miracles qui vont être racontés 50 ans plus tard sous forme d’une série de médaillons dans les peintures murales qui couvrent la nef de la chapelle. Ces peintures ont été redécouvertes au milieu du XXe lors d’une restauration du bâtiment qui a souffert d’abandon au XIXe. Elles avaient été recouvertes de plâtre ce qui a permis leur survie en relativement bon état. C’est vraiment une BD avant la lettre ! De petites scènes nous racontent ce qui s’est passé : l’apparition de la vierge, le miracle du pain, celui du cavalier sauvé et tant d’autres. Et donc, le médaillon n° 10 raconte l’épisode du passage des hérétiques huguenots. On y voit le Sieur de Sus jetant la statue dans les flammes. Ce sanctuaire aujourd’hui éloigné des grands lieux de dévotion et de tourisme vaut le détour. Sa religiosité naïve mais profonde, que ce soit dans les fresques ou les statuaires – le XVIIe baroque est friand de merveilleux – vous plaira.

Pour approfondir

Gallica BNF Bascle de Lagrèze G, 1863, Histoire religieuse de Bigorre Étienne Molinier, Histoire de Nostre Dame de Grâce de Bruguières en diocèse de Tolose, 1644 X Recroix, les peintures du narthex de la chapelle de Garaison Site Aleteia.org

Par Élisabeth Brinkman membre du comité de rédaction